BIYA - KAMTO…OU L’AUTRE FARCE DE MAITRE PATHELIN
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Il y a, dans le jeu de masques qui tient en haleine la scène politique nationale, quelque chose qui confine au gangstérisme intellectuel. Comme un kidnapping qui «kondenguise» l’esprit et détourne l’analyse. Comme une prise d’otages, un encagoulement forcé et forcené dicté par une urgence aux senteurs d’opportunisme. Des mots claquent, sortis de nulle part, sans sens consensuellement construit mais admis tels une panacée. Des visions apparaissent, s’entrechoquent, se télescopent bien que fondamentalement nourries de la même ambition. Des clivages et désencastrations explosent nos mensonges séculaires et nos hypocrisies refoulées. Des gourous émergent, les uns moins modérés que les autres, tous détenteurs d’une vérité à laquelle les masses doivent se rendre pieds, poings et langues liés. Sous risques d’injure, de bannissement, d’ostracisation voire de mort.

Biya – Kamto.

On nous fait croire qu’il s’agit d’un combat pour la paix et la patrie. Foutaises ! Jamais notre pays n’a été aussi soumis à de forces totalitaires, bâties sur les mêmes structures et ne s’opposant que sur la superficialité des mots et les lieux d’expression du marketing politique.

MESSIANISMES.

D’un cote, on renie Dieu pour le «Créateur». De l’autre, on insulte, bloque, casse pour le «Prof». Face aux silences du Nnom Ngui ou devant le Curriculum Vitae du «Président élu», la posture recommandée est la génuflexion. Toute autre attitude est blasphématoire, violemment réprimée par Atanga Nji ou la BAS. La marque, c’est le Chef. Il faut vendre «le Chef», gagner et placer le maximum d’âmes au service du Chef. Lobbying dans les salons occidentaux ou StreetMarketing à Buea/Paris, il faut promouvoir le Chef. C’est le Chef ou le néant. Dans un camp comme dans l’autre, le système politique (s’il existe) est lui-même chevillé…au Chef ! Le Cameroun ? On verra plus tard.

TRAVESTISSEMENTS.

Pour les Biyaïstes, l’histoire du Cameroun commence le 6 novembre 1982. Pour les partisans de Kamto, l’histoire du Cameroun commence aussi…le 6 novembre 1982. Les premiers parlent du Cameroun comme d’une Bénoué de succès éclatants et les seconds le décrivent comme une Sanaga d’échecs retentissants. Noir, c’est noir. Blanc, c’est blanc. Mesure et équilibre agonisent sous les coups de boutoir de la mauvaise foi politique. Constitution, emblèmes et symboles de la République perdent leurs inviolabilité, triturés et malmenés par des radicalismes partisans qui, au RDPC comme au MRC, ont en sus l’impudence de se justifier.

ETHNISMES.

Sur le site web du RDPC, la région d’origine de Paul Biya est présentée comme «socle granitique» du parti au pouvoir. Personne ne s’émeut de ce qu’un parti créé à Bamenda, porté à bout de bras par l’électorat du Grand Nord, déclare avoir ses racines …dans le Sud. Pourquoi s’étonner dès lors que 130 des 159 personnes arrêtées avec Maurice Kamto le 26 janvier 2019 aient des patronymes à résonnance Bamiléké ? Pourquoi récuser Nitcheu, Datchoua ou Wanto ? L’inconsistance politique rame avec les pagaies de la facilité. Que l’on questionne le profil de leurs hommes d’influence ou sonde le poids numérique des «frères» dans le soutien de leur cause, le constat est identique : à défaut de flirter publiquement avec l’ethnie, Biya et Kamto l’entretiennent remarquablement. Atanga Nji, Françoise Foning et Jean Nkuete ici ? J. Remy Ngono, Me Ndocki et Valsero là-bas ? De la cosmétique pour jour de marché …ou presque.

OPPORTUNISMES.

Au MRC, c’est la formule-magique, la rengaine de l’heure, injectée dans tous les discours et communiqués avec l’efficacité perverse d’un message subliminal : «Nos frères qui meurent dans le Nord et le Sud-Ouest….Vu la situation catastrophique dans le Nord et le Sud-Ouest». Ce n’est pas que la crise du NO-SO soit une chimère. C’est que le MRC s’investit sans honte dans le commerce des émotions et la compassion à géométrie variable. Pour comprendre, rappelons-nous que le MRC est créé en juin 2012. L'info claire et nette. De janvier 2015 à juin 2016 (soit trois ans après sa création), les attentats de Boko Haram, selon Amnesty International, faisaient 986 morts parmi les civils camerounais du Nord. En juillet 2016, l'ONG internationale recensait 147 cas de disparitions forcées, dont 130 habitants dans les villages de Magdémé et Doublé. Réaction du MRC ? Euuuhhh….en 2016, il n’y avait pas de penalty à tirer. Autre temps, autres lieux : environs 15 000 camerounais tués par le VIH en 2017. Boycott du défilé du 20 mai par le MRC pour appeler à la gratuite des ARV ? Que Nenni. Ce n’était peut-être pas nos «frères».

Il ne faut pourtant pas en vouloir au MRC. Savoir choisir l’heure de l’indignation patriotique est un art, régulièrement pratiqué par le Biyaïsme. La partie anglophone du pays est (malheureusement encore !) un des terreaux favoris de son expérimentation. Il y eut le lac Nyos et ses 1 746 morts, le 21 aout 1986. Il y eut surtout l’Affaire Bakassi, de 1994 au 14 août 2008. La phrase-magique des pro-Biya était alors : «Le pays est en danger, en proie à l’envahisseur». Il fallait taire toutes les frustrations (dévaluation du franc CFA, villes mortes, embastillement des opposants, opération Coup de cœur, fonctionnaires déflatés…). Et faire bloc derrière…le Chef. Nous le fîmes assidument pendant quatorze ans !

DISPOSITIFS MEDIATIQUES.

Paul Biya a son «tam-tam» (dixit Charles Ndongo) : l’opulente CRTV accompagnée dans le combat cathodique par Canal2, Vision4 et bientôt Africa24 -rachetée le 30 avril dernier par Samuel Mvondo Ayolo. La presse écrite locale et les régies d’affichage semblent également avoir fait allégeance au Pouvoir. On trie, on censure ce qui se dit ou se montre du Chef. Si vous êtes sardinard, ce sont les lieux de pèlerinage indiqués pour entretenir la foi au «Créateur». Sur Internet (qu’elle domine outrageusement), l’église tontinarde applique les mêmes règles, avec une religiosité et une roublardise identique. Plusieurs dispositifs sont mis à contribution pour un seul et même objectif : la défense du «Profète». Coté Télévision, la GCTV est prête mais quelque peu balbutiante. Le site de la diaspora camerounaise de Belgique. Sur Facebook, YouTube et Twitter, Boris Berthold, Paul Chouta, Mathieu Youbi et J. Remy Ngono tiennent le haut du pavé à coup de directs ; la main toujours sur les boutons «censure» et «blocage» pour toute opinion dissidente. Exactement comme le camp d’en face. Faut pas se tromper : Rassemblement démocratique et Mouvement pour la renaissance ne signifient pas forcement Acceptation de l’opinion divergente.

On peut analyser le clair-obscur de leurs lignes de démarcation idéologique ou les dérapages multiples de leurs «intellectuels» respectifs (Fame Ndongo contre Nganang). Il restera que, sous l’agitation politicienne entretenue, le RDPC et le MRC tentent de pousser les camerounais à ne regarder l’avenir de leur pays qu’à travers l’œil de Biya ou de Kamto. Cette démarche est à la fois pernicieuse, dangereuse et menteuse. Pernicieuse, parce que visant à perpétuer un messianisme suranné/improductif (Mythe du Sauveur), alors que la priorité doit aller aux systèmes, aux institutions et aux mentalités. Camer.be. Dangereuse parce susceptible de renforcer ces clientélismes, mal gouvernance, incompétences et distractions qui plombent notre décollage. Menteuse, parce qu’il ne suffit pas d’avoir un messie à Etoudi pour éviter l’Apocalypse. Nos jeunesses déflorées, nos espoirs syphilisés, nos agonisantes aspirations au bien-être ne trouveront leur Eden ni dans le culte perpétuel à un supposé «Créateur», ni dans l’avènement opportuniste d’un «Prof-ète». La voiture Cameroun est en panne et la redémarrer exige bien plus complexe qu’un changement de chauffeur. Du «Soppi» sénégalais à l’accession de Tshisekedi à la magistrature suprême en passant par le mouvement «Blaise, Dégage » et les printemps dits arabes, les exemples abondent qui montrent que le changement de chauffeur, en Afrique, est insuffisant à impulser un changement radical de sens.

  • Il faut donc se tenir loin de Biya et de ses sbires.
  • Il faut se méfier de Kamto et ses cerbères.
  • Il faut s’affranchir de cette opposition stérile, de cet antagonisme sans dépassement qui vise strictement le partage du gâteau national entre un individu (fut-il un sauveur) et une clique d’affidés aux appétits gargantuesques.
  • Il nous faut revenir à nos moutons.
  • Il nous faut revenir au Cameroun et à toutes les ramifications de sa problématique de développement.

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