Affaire Mebe Ngo’o: la Société Camerounaise Banque du Cameroun éclaboussée
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Affaire Mebe Ngo’o: La Société Camerounaise Banque Du Cameroun Éclaboussée :: Cameroon

Victor Emmanuel Menye, le directeur général adjoint de la Société camerounaise de banque (Scb), filiale du groupe marocain Attijariwafa, a été mis en détention provisoire dans le cadre d’une affaire judiciaire où il est reproché des malversations financières, à hauteur de milliards, à l’ancien ministre de la Défense.

Agé de 59 ans, Victor Emmanuel Menye, le directeur général adjoint (DG-A) de la Société camerounaise de banque (Scb), est en détention provisoire depuis le 9 mars dernier. C’est dans le cadre de ce qu’il est convenu d’appeler « l’affaire Mebe Ngo’o). En effet, le commissaire de police divisionnaire, Oko Petis, a signé le 5 mars 2019 dans la nuit, un bon de garde-à-vue aux noms des nommés Edgard Alain Mebe Ngo’o, ancien ministre de la Défense ; Maxime Mbangué, ancien conseiller technique au ministère de la Défense ; Joël Mboutou, colonel de l’armée et ancien adjoint en chef du secrétaire militaire ; puis Victor Emmanuel Menyé, directeur général adjoint de SCB Cameroun, la filiale locale du groupe bancaire marocain, Attijariwafa Bank.

M. Menye est considéré proche de M. Mebe Ngo’o. Il est même présenté comme son banquier. Le bon de garde-à-vue contre ces personnalités, précise le commissaire Oko Petis, est lié «aux instructions du parquet général du Tribunal criminel spécial (TCS) dans l’affaire ‘’situation de la société Magforce Cameroun’’». En effet, depuis fin janvier 2019, l’ancien ministre de la Défense et certains de ses anciens collaborateurs sont interdits de sortie du territoire camerounais et sont régulièrement auditionnés par les enquêteurs du Tribunal criminel spécial, juridiction d’exception mise en place pour traquer les prévaricateurs de la fortune publique.

Selon nos sources, l’une des affaires sur lesquelles Edgard Alain Mebe Ngo’o est auditionné, concerne les contrats d’achats d’équipements militaires pour le compte de l’armée camerounaise, auprès de la société Magforce; contrats sur lesquels pèsent des soupçons de malversations, notamment des détournements de deniers publics et des rétro-commissions.

Quel rôle aurait joué Victor Menyé ? La banque a-t-elle servi de plaque tournante ou de lieu de transit d’argent sale ? La SCB était-elle au courant des agissements de son DGA ? Ce dernier a-t-il agi seul et de son propre chef ? Quelles pourraient être les conséquences sur les finances de la banque ?

Après l’incarcération d’Edgard Alain Mebe Ngo’o à la prison centrale de Yaoundé, le 8 mars 2019, cet ancien ministre de la Défense, ancien directeur du cabinet civil de la présidence de la République et ex-patron de la police camerounaise, a été rejoint par son épouse, Bernadette, le 11 mars 2019 dans ce pénitencier.

Coactions ?

Le couple Mebe Ngo’o et trois coaccusés ont été inculpés par le Tribunal criminel spécial (TCS), une juridiction spéciale qui lutte contre les détournements de la fortune publique au Cameroun, pour des malversations présumées dans des contrats d’achats d’équipements militaires auprès de la société française Magforce. Selon les premiers éléments de l’enquête, le préjudice solidairement causé au Trésor public à la faveur de ces malversations présumées est estimé à plus de 100 milliards de Fcfa. A en croire des informations dignes de foi, deux fils du couple Mebe Ngo’o sont également dans la ligne de mire du Tribunal criminel spécial, dans le cadre de ce dossier qui, il y a peu, a fait les choux gras de la presse française.

Quel rôle aurait joué Victor Menyé, le DG-A de la SCB dans le cadre de cette affaire ? La banque a-t-elle servi de plaque tournante ou de lieu de transit d’argent sale ? La SCB était-elle au courant des agissements de son directeur général adjoint ? Ce dernier a-t-il agi seul et de son propre chef ? Quelles pourraient être les conséquences sur les finances de la banque ? La maison-mère Attijariwafa était-elle au courant ? Toutes interrogations n’ont pour l’instant pas de réponses claires tant, la banque se terre derrière un mutisme, pour le moins curieux. Les responsables approchés au sein de la filiale marocaine ne daignent pas apporter des éclairages pour rassurer les clients ou le public. Mais un fait sûr, la SCB n’avait pas besoin de ce scandale financier qui l’éclabousse. Car sur l’organigramme, Victor Emmanuel Menye fait partie du top management de la banque. C’est certainement au fur et à mesure de l’évolution de l’enquête judiciaire que l’on en saura davantage.

SCB : la banque qui n’avait pas besoin d’un autre scandale

Avant l’arrestation du DG-A Victor Emmanuel Menye, la SCB n’avait pas encore fini de digérer un précédent scandale. De fait, à la Société camerounaise de banque, des comptes ont été approvisionnés de plusieurs dizaines de millions de FCFA, ces derniers temps, sans véritable traçabilité. Des informations recueillies auprès des responsables de cette entreprise de la finance renseignent que son directeur général Mohammed Mejbar, a d’ailleurs déposé récemment une plainte à la direction régionale de la police judiciaire pour le littoral à Douala, suite à des irrégularités observées dans le système de gestion de la banque. Il était question, en fait, de transferts de fonds irréguliers et des virements suspects interceptés dans des comptes y logés.

En l’occurrence, des centaines de millions de FCFA transférés, de façon frauduleuse, à plusieurs clients de la banque, pour un montant total d’environ 2 milliards de FCFA. Selon les mêmes sources, cinq cadres de la direction informatique de la Scb, trois cadres de la Scb, et deux importateurs locaux, seraient déjà été placés sous détention provisoire à la direction régionale de la police judiciaire pour le Littoral, pour cette affaire.

Et pourtant, la SCB se porte plutôt bien du point de vue financier. Au cours de la période 2014-2016, le montant global du dividende versé à l’Etat camerounais par SCB Cameroun est de 15,9 milliards de FCFA

Toutefois, face à la délicatesse d’un tel dossier, certains préfèrent jouer la carte de la prudence, dès lors que certains responsables des systèmes d’information de la banque ayant des droits particuliers dans ledit système bancaire ne sont curieusement ni suspectés ni interpellés, étant donné que la responsabilité des supérieurs hiérarchiques des personnes arrêtées est également engagée du fait de la stratification verticale de la chaîne de décision. Ceci, pour la simple raison que dans le système bancaire, « les engagements et les mouvements financiers sont soumis à des niveaux de responsabilité gérés par les accès et codes informatiques traçables ».

Et pourtant, la SCB se porte plutôt bien du point de vue financier. Au cours de la période 2014-2016, le montant global du dividende versé à l’Etat camerounais par SCB Cameroun est de 15,9 milliards de FCFA. Cette enveloppe de dividende dépasse de près de 2 milliards de FCFA, la somme de 14 milliards de FCFA versée à l’Etat, au titre de dividende sur la même période, par la Société nationale des hydrocarbures (SNH), le mastodonte pétrolier public, que l’Etat contrôle à 100%. Selon les mêmes données, le 3ème contributeur aux dividendes reçus par l’Etat du Cameroun, au cours de la période 2014-2016, est la filiale locale du groupe bancaire français Société Générale, avec une enveloppe globale de 2,48 milliards de FCFA versée à l’Etat, sur la période considérée. Au total, entre 2014 et 2016, l’Etat du Cameroun a reçu un dividende global de 36,3 milliards de FCFA en provenance de 12 entreprises dans lesquelles il détient des actifs, sur les 84 que comptait le pays au cours de la période sous revue.

Victor Menye sur les chemins d’un autre DG-A, Ondoa Nkou ?

Victor Emmanuel Menye est-il sur les traces de son ancien homologue Innocent Ondoa Nkou, ex-directeur général adjoint (DG-A) de la Banque internationale du Cameroun pour l’épargne et le crédit (Bicec), filiale camerounaise du groupe français BCPE ? Les cas ne sont pas forcément similaires mais toujours est-il qu’avant Victor E. Menye, lui aussi DG-A de la SCB, M. Ondoa Nkou, a été écroué le 8 août 2016 à la prison centrale de Douala, à New-Bell.

Innocent Ondoa Nkou a entraîné avec lui, Benoit Ekoka, expert-comptable, Samuel Ngando Mbongue, ancien directeur de la comptabilité et de la trésorerie et Martin Nyamsi, prestataire de service à travers son entreprise « Interface » ont aussi été interpellés. L’arrestation de ces quatre inculpés est partie d’une enquête interne ouverte par l’actuel directeur général de la Bicec, Alain Ripert, qui a permis de révéler, début 2016, un scandale financier d’un montant de 50 milliards de FCFA via des surfacturations et factures fictives, régulièrement payées à des prestataires sur une période de 12 ans.

La descente aux enfers d’Innocent Ondoa Nkou a commencé en février dernier lorsqu’il a été contraint de démissionner de son poste à cause de l’affaire dite des 50 milliards de FCFA. Le 2 août 2016, alors qu’il avait déjà passé une vingtaine d’années au poste de directeur général adjoint, M. Ondoa Nkou a été remplacé par Isabelle Kondo.

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