Cameroun- Livre: LE CULTE DE LA PERSONNALITE AU CAMEROUN D’AHMADOU AHIDJO A PAUL BIYA
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Cameroun- Livre: LE CULTE DE LA PERSONNALITE AU CAMEROUN D’AHMADOU AHIDJO A PAUL BIYA :: CAMEROON

Le culte de la personnalité sous Ahmadou Ahidjo a revêtu toutes les formes classiques de ce type de propagande politique. Il lui a été fabriqué une série de surnoms, les uns plus extravagants que les autres. Nous citons de mémoire ceux-ci :

- Père de l’indépendance ;

- Apôtre de la paix ;

- Bâtisseur infatigable ;

- Grand timonier ;

- De Gaulle africain ;

- Mao-Tsé-Toung camerounais ;

- Guide éclairé et infaillible ;

- Guide génial et providentiel ;

- Grand camarade ;

- Envoyé spécial de Dieu sur terre

Ces surnoms avaient complétement fait disparaître l’usage de son propre nom. On ne le désignait que par l’un d’eux. Au niveau de son parti l’Union Nationale Camerounaise, UNC, le surnom usité était : « Grand camarade ». C’est ainsi qu’il était désigné. Radio Cameroun de son côté, utilisait de préférence, « Guide éclairé et infaillible du

peuple camerounais», quand il ne l’appelait pas « Chef d’Etat ». Un jour de mes yeux, j’avais découvert une banderole barrant la route entre le Trésor et la poste centrale à Yaoundé, et sur laquelle il était inscrit en gros caractères : « Vive Ahmadou Ahidjo, envoyé spécial de Dieu sur terre pour sauver le Cameroun ». J’en fus estomaqué. C’était en 1974 ou 1975, je ne me souviens plus de l’année exacte.

Parallèlement aux surnoms, il avait été commandé de nombreuses chansons auprès de chanteurs camerounais. On les avait qualifiées de « chansons patriotiques ». Tout au moins, c’est ainsi qu’elles étaient désignées par les speakers de Radio Cameroun. Je peux en chanter quelques-unes de mémoire :

Viveeeeeeee

Ahmadou Ahidjoooo

Présideeeent

Son Excellenceeee

Nous vous souhaitons

Bonne santé et prospéritééééé

C’était un morceau joué aux balafons. Si j’ai bonne mémoire, c’est le célèbre groupe

« Richard bande de Zoétélé » qui l’avait composé.

Ou encore :

Vingt ans de progrès, Vingt ans de paix

……………………….

Bravo au promoteur

Ahmadou Ahidjo, Artisan de la paix Et de l’unité

Auteur : Talla André-Marie.

(…)

Le culte de la personnalité sous Ahidjo a également atteint les « intellectuels ». De nombreux livres de glorification ont été écrits sur sa personne. Joseph Charles Doumba, Henri Bandolo, Joss-Blaise Alima et bien d’autres, ont écrit des dithyrambes sur lui. Le livre de Joseph Charles Doumba avait pour titre : « Vers le mont Cameroun »1. Une chose frappait le lecteur qui le parcourait, la vénération que portait à Ahidjo un homme comme Aurélien Etéki Mboumoua. C’était révoltant. Le livre de

Joss-Blaise Alima devait s’intituler : « Les chemins de l’unité »2.

Henri Bandolo quant à lui avait écrit un livre que personne n’a jamais lu. En effet, lorsque le 4 novembre au soir Ahmadou Ahidjo annonce son départ du pouvoir, Bandolo est pris de panique. Il téléphone en catastrophe aux premières heures le lendemain à son imprimeur à Paris, pour s’enquérir si le livre avait déjà été expédié. Réponse négative. Soulagement de Bandolo. Il lui ordonne aussitôt de brûler tout le stock, et n’exige aucun remboursement. Stupéfaction de l’imprimeur. « Faites ce que je dis ! » aboie Bandolo au téléphone. Que contenait ce livre déjà imprimé et que le départ d’Ahidjo a envoyé au feu ? Quoi qu’il en soit, il écrit peu de temps après, un nouveau livre intitulé : « La flamme et la fumée »3, dans lequel il est désormais sans pitié avec Ahidjo…

Pierre-Flambeau Ngayap, actuellement Sénateur nommé par Paul Biya, a connu la

même mésaventure. Au mois d’août 1982, tous les deux nous déjeunons au restaurant de la Cité Internationale, Boulevard Jourdan, à Paris. Il se met à me vanter un livre qu’il vient d’écrire sur le régime d’Ahidjo, et, bien mieux, qu’il lui a adressé pour approbation. J’en suis coi ! Cela flatte son ego, et il se met à crâner devant moi. A la fin du repas, nous nous séparons. Le 4 novembre, soit tout juste trois mois plus tard, Ahidjo démissionne. Avait-il déjà répondu à la demande de Ngayap ? Impossible de savoir. En tout cas, le livre ne paraît plus. Ou plutôt, il adopte pour titre désormais : « Cameroun, qui gouverne ? De Ahidjo à Biya l’héritage et l’enjeu ».4 Il est naturellement bien remanié. (…)

LE CULTE DE LA PERSONNALITE SOUS PAUL BIYA

(…)

Il prévaut ainsi tout un courant d’opinion au Cameroun selon lequel, « Paul Biya est mal entouré, mal conseillé ». A chaque décision impopulaire qu’il prend, on entend aussitôt :

« on a encore trompé le président ; le président fait confiance aux gens, mais ceux-ci le trompent, s’attellent à rendre son régime impopulaire, conspirent permanemment contre lui, sabotent son travail »

Dès lors que l’on tente de critiquer Paul Biya sur sa gestion, on entend aussitôt :

« Paul Biya est malheureux ; à qui peut-il faire confiance ? En accédant au pouvoir, il a fait confiance à ses camarades du séminaire, mais, tous l’ont trahi ; puis il s’est tourné vers ses camarades du lycée Leclerc, même chose ; il s’est tourné vers les jeunes, là alors ça été la catastrophe ; le pauvre, que voulez-vous qu’il fasse ? »

(…)

Un ministre bien en vue de son régime déclarait ainsi dans la foulée à Ebolowa devant un public médusé :

« Paul Biya ne mérite pas de gouverner un pays tel que le Cameroun, ni un peuple tel que celui du Cameroun ; il aurait dû naître aux Etats Unis d’Amérique et y être président de la République ».

Cette conception (…) amène les personnes qu’il désigne au gouvernement à

se comporter en véritables laquais. D’une nomination à l’autre, on entend ainsi cette déclaration quasi-rituelle :

« Je remercie le chef de l’Etat pour la confiance qu’il a placée en ma misérable personne »

Ou encore :

« je remercie de tout cœur le chef de l’Etat, son excellence Paul Biya, pour la haute confiance qu’il a bien voulu placer en moi, et je lui promets de donner le meilleurs de moi-même pour être à la hauteur de celle-ci… »

En clair, tout nouveau promu au gouvernement se défend, publiquement, d’avoir été désigné, non pas en vertu de sa compétence ou de son mérite, mais plutôt parce que « le chef de l’Etat, son excellence Paul Biya » lui a accordé, de manière accidentelle, cette grâce, à la manière de Jésus Christ accordant sa grâce à un pauvre pêcheur. Ayant prononcé cette phrase à la fois d’allégeance et de servitude, il passera tout son séjour au gouvernement à réitérer cette allégeance, au point de se transformer, dès les semaines qui suivent sa nomination, en un véritable « perroquet » politique.

(…)

A l’Assemblée Nationale, pour défendre le budget du ministère dont il a la charge :

« le présent projet de budget est conforme aux hautes instructions du chef de l’Etat, son excellence Paul Biya, (après avoir dit cela, il marque un temps d’arrêt pour bien montrer la gravité des paroles qu’il vient de prononcer, jette un regard circulaire dans l’hémicycle, et, enfin, poursuit son discours)

A l’ouverture d’un séminaire :

« dans le cadre de la politique définie par le chef de l’Etat, son excellence Paul Biya, etc… »

Face à la presse :

« le chef de l’Etat, son excellence Paul Biya, soucieux du bien-être de la population… »

Un discours en province :

« le chef de l’Etat, son excellence Paul Biya, a placé … au cœur de ses préoccupations … »

Une prise de parole quelconque devant les caméras :

« c’est un engagement personnel du chef de l’Etat, son excellence Paul Biya, qui a inscrit dans son programme pour le septennat… »

Si jamais sa fidélité est écornée par quelque journaliste impertinent :

« mon engagement derrière le chef de l’Etat, son excellence Paul Biya, est indéfectible, et je fais tout pour mériter, le plus longtemps possible, sa haute confiance… »

……………………………………….

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