Afrique, Artemisia : Une plante qui guérit des cas de palu sévère là où les remèdes ont échoué
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Afrique, Artemisia : Une Plante Qui Guérit Des Cas De Palu Sévère Là Où Les Remèdes Ont Échoué :: Africa

Quand les remèdes prescrits n’arrivaient plus à guérir 18 impaludés en situation désespérée, leur médecin traitant dans une clinique du Congo, en se basant sur les procédures du “compassionate use” de l’EMA, a eu recours à un médicament non encore officiellement autorisé et consistant en comprimés de feuilles séchées de la plante Artemisiaannua (désignés sous DLA).

Selon un communiqué de presse du Worcester Polytechnic Institute. Il n’a fallu que 5 jours pour que tous les malades soient complètement guéris. Un tel résultat permet d’envisager une lutte efficace contre le problème croissant de la résistance aux médicaments antimalariaux. Les détails des traitements sont décrits dans l’article. “Artemisia annua dried leaf tablets treated malaria resistant to ACT and i.v. artesunate: case reports”. Les médecins ayant réalisé ces traitements font partie d’une équipe internationale dirigée par Pamela Weathers, PhD, professor of biology and biotechnologyat Worcester Polytechnic Institute (WPI). Le Pr Weathers depuis de longues années promeut l’utilisation de l’Artemisia annua comme remède contre le paludisme.“A notre connaissance, ceci est le premier travail démontrant que l’administration de feuilles séchées de Artemisia annua permet de contrecarrer la résistance due aux ACT chez des humains”, selon les propos des auteurs de l’article de Phytomedicine, tout en reconnaissant que des essais cliniques à une plus large échelle sont souhaitables pour confirmer cette découverte. A leur avis, la guérison complète par les DLA de ces 18 cas résistant aux ACT devrait conduire à une intégration rapide de ce traitement, en Afrique et partout ailleurs où des résistances sont devenues évidentes.

Le rapport scientifique documente l’expérience de 18 impaludés dans la province du Nord Kivu de la République Démocratique du Congo. Tous avaient les symptomes évidents d’impaludés et furent en première instance traités par des ACT (artemisinin-based combined therapy) qui associe l’artemisinine extraite de la plante Artemisia annua avec une autre molecule active contre le parasite Plasmodium. Les 18 patients, dont l’âge s’étalait de 14 mois à 60 ans, ne répondaient plus au traitement ACT classique, leur état s’agravait conduisant à des évanouissements, à des problèmes respiratoires, à des convulsions et à des oedèmes pulmonaires. Un des patients, enfant de cinq ans, était tombé dans le coma. Dans une seconde étape tous furent traités par injection intraveneuse d’artesunate, traitement de dernier recours recommandé en cas de malaria sévère. Mais chez aucun des patients l’état ne s’améliorait.

C’est dans situation désespérée que les médecins ont eu recours au DLA (dried leave Artemisia), une thérapie développée et étudiée par Weathers et son équipe au WPI. Après 5 jours de traitement avec des comprimés constitués uniquement de feuilles sèches et moulues d’Artemisia les maladies étaient complètement guéris. Le produit avait été conditionné et analysé en detail selon les procédures mises au point par Weathers et Melissa Fowler, postdoctoral fellow. Les essais de laboratoire confirmaient que le sang des patients guéris était totalement exempt de parasites. En parallèle, Weathers avait pu observer que chez une centaine d’autres impaludés donnant des signes de résistance aux ACT, les DLA permettaient une guérison complète.“Les 18 patients avec malaria sévère étaient en train de mourir”, nous dit Weathers, “et de constater une guérison totale, même de l’enfant comateux était surprenante Notre étude est de taille réduite, mais les résultats apportent un puissant message d’espoir”.

Selon l’OMS 212 millions de personnes étaient affectées par le paludisme en 2015 et quelque 429 000 en sont morts, surtout chez les enfants et les femmes enceintes. Cette maladie transmise par un moustique existe dans une centaine de pays et est une menace pour la moitié de l’humanité. Le remède ACT est difficile à produire, il est cher et d’accès difficile dans les regions reculées où le paludisme frappe le plus fort. Malheureusement, il donne des signes de résistance en de nombreux pays, non seulement en Asie du Sud-Ouest.

Weathers a commencé ses travaux de recherche portant sur l’artemisinine et l’Artemisia annua il y a déjà 25 ans. Au cours de dernières années son attention s’est portée sur les DLA comme remède alternatif. A noter que l’Artemisia annua est utilisée depuis des milliers d’années par les humains pour traiter plusieurs maux. Aux Etats-Unis elle est classée comme GRAS (generally considered as safe). Elle est généralement utilisée en tisane ou décoction, mais Weathers a émis l’hypothèse que la consommation de la plante entière pouvait être plus efficace que celle d’extraits ou d’infusions.Une étude publiée dans PhytochemistryReviews en 2011 démontrait pour la première fois que les feuilles sèches d’Artemisia annua délivraient 40 fois plus d’artemisinine au sang que l’extrait chimique. Dans un article scientifique publié l’année suivante dans PLOS ONE, Weathers et son équipe montrèrent que les DLA ne possèdent pas seulement des propriétés antimalariales, mais étaient plus efficaces à éliminer le parasite chez les souris que d’autres traitements. En 2015 dans une étude publiée dans Proceedings of the National Academy of Sciences, les chercheurs du WPI ensemble avec leurs collègues de l’University of Massachusetts Amherst, montrèrent que les feuilles d’Artemisia arrivaient à guérir des rats infectés par

des souches de Plasmodium connues pour leur résistance à l’artemisinine. Dans une expérience parallèle, censée étudier l’évolution accélérée de la résistance du parasite en le faisant consommer à travers 49 générations de souris, aucun signe de résistance ne fût mis en evidence. Weathers est de l’avis que l’efficacité supérieure des DLA comparés aux ACT, de même que leur capacité à tuer des parasites résistants, leur pouvoir même à éviter le piège de la résistance, est dû à la synergie entre un ensemble de molecules présentes dans les plantes, dont certaines ont déjà été étudiées pour leur pouvoir antipaludique et d’autres qui ne font qu’augmenter la concentration d’artemisinine dans le sang et gonfler ses propriétés. Les feuilles séchées constituent donc une polythérapie naturelle des plus robustes, dépassant de loin les effets des ACT et autres remèdes présentement en usage.“Nous avons fait de grands efforts pour connaître la biochimie de ces constituants, dont font partie les flavonoides et les terpenes, et de comprendre le rôle qu’elles peuvent jouer dans les propriétés pharmacologiques”, nous dit Weathers. “A chaque nouveau pas dans notre recherche notre excitation s’accroît et de voir que les DLA peuvent devenir les remèdes de choix dans la lutte mondiale contre la malaria. Il a été démontré que Artemisia annua était efficace contre d’autres maladies tropicales et peut-être contre le cancer. Notre recherche continue”.

Un autre avantage de taille des DLA comparé aux traitements chimiques est leur bas coût et leur facilité de réalisation. La fabrication d’ACT requiert des installations lourdes. Les DLA peuvent être réalisés avec un équipement relativement simple. Planter de l’Artemisia et fabriquer des comprimés sur place peut constituer une activité créant des emplois, tout en rendant accessible le remède dans les villages reculés.En fait, Weathers fait déjà partie d’un réseau de plantations en Afrique de l’Est, conforme aux GMP (Good Manufacturing Practices). Des installations en Ouganda permettent de sécher, de moudre et d'homogéniser la poudre, de la compacter en comprimés et de les analyser sur leur contenu. C’est cette chaîne de production qui a permis de disposer des comprimés pour le traitement des 18 patients en RDCongo. Et Weathers de conclure:” Une approche des plus simples qui peut être mise en place et gérée par les Africains pour les Africains”.

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