Bouaké : le rôle de Villepin pointé par un nouveau témoignage
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Le 6 novembre 2004, le bombardement du camp français de Bouaké par l'aviation ivoirienne avait coûté la vie à neuf soldats français et un américain. Douze ans plus tard, on croyait l'instruction de l'affaire Bouaké terminée. En février dernier, la juge avait sollicité le renvoi de trois anciens ministres de Jacques Chirac devant la Cour de justice de la République pour avoir entravé le travail de la justice. Mais un nouveau témoignage est venu grossir un dossier qui comporte déjà plusieurs dizaines de milliers de pages.

Mercredi 6 avril, la juge Sabine Khéris a auditionné l'homme d'affaires Jacques Dupuydauby. Selon nos informations, il a raconté avoir déjeuné en 2007 avec l'ancien ministre de la Défense Michèle Alliot-Marie, une amie de longue date. « Elle m'a indiqué que dans cette affaire toutes les décisions avaient été prises par son collègue, Dominique de Villepin », alors ministre de l'Intérieur, et qu'« en ce qui concernait l'aspect pratique et opérationnel des événements », c'était un grand groupe français qui s'en était chargé, « tant en ce qui concernait les armes que les mercenaires ».

Jacques Dupuydauby assure que cette version lui a été confirmée début juillet 2012 par l'actuel ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian. « Il m'a dit qu'il avait consulté ses services de renseignements », précise l’homme d’affaires qui « connaît depuis plus de 30 ans » Jean-Yves Le Drian.

Quel aurait été le rôle exact de Dominique de Villepin, alors ministre de l'Intérieur ? Jacques Dupuydauby ne donne ni précision, ni preuves. L'ancien industriel, qui a notamment géré des ports au Gabon et Togo, s'en explique : « Je suis un "bordurier", ce n'est pas une affaire qui me concerne directement ».

« Le plus gros mensonge du dossier »

Ce témoignage apporte en tout cas de l'eau au moulin de la juge d'instruction qui a sollicité auprès du procureur le renvoi du ministre, ainsi que celui de Michèle Alliot-Marie et Michel Barnier, devant la Cour de justice de la République. Sabine Khéris estime que « tout [a] été orchestré afin qu'il ne soit pas possible d'arrêter, d'interroger ou de juger les auteurs biélorusses du bombardement. » Elle parle d'« une concertation au plus haut niveau de l'Etat » français.

Pour Jean Balan, l'avocat de la plupart des parties civiles, le témoignage, qu'il juge « très crédible », renforce sa conviction « qu'une camarilla française est à l'origine du bombardement sur le camp de la force Licorne. Il aurait eu pour but de pousser Laurent Gbagbo [l'ancien président ivoirien] à la faute et le destituer. L'armée, le Parlement, le gouvernement et les médias ont été manipulés. Depuis 11 ans, on a tout fait pour cacher la vérité. L'audition de Dominique de Villepin en février 2008 est sans doute le plus gros mensonge du dossier. Il a affirmé ne rien savoir alors que c'était la personne la plus informée du dossier ivoirien ! »

Sept mois avant le bombardement, Dominique de Villepin était ministre des Affaires étrangères et avait participé activement à la signature des accords inter-ivoiriens de Linas-Marcoussis. Plusieurs sources confirment qu'il continuait de s'intéresser à la crise ivoirienne même après avoir quitté le Quai d'Orsay.

Démentis

Dominique de Villepin a toujours nié avoir eu à traiter cette affaire quand il était en poste. Il n'a pas souhaité réagir. Le cabinet de Jean-Yves Le Drian « dément catégoriquement que le ministre ait transmis la moindre information en provenance des services de renseignements à M. Dupuydauby concernant cette affaire ». L'entourage de Michèle Alliot-Marie assure qu'« après vérification de tous les agendas de l'ancien ministre, ce déjeuner en 2007 [entre elle et le témoin] n'a jamais eu lieu ». Quant au groupe mis en cause par Jacques Dupuydauby, il dénonce des « élucubrations » et des « accusations intolérables » portées contre lui et menace de poursuites.

De façon inhabituelle, la vice-procureure, Mme Sandrine Guillon, a assisté à l'audition du témoin alors que le parquet doit se prononcer prochainement sur l'ordonnance de la juge Khéiris. En 2012, Jacques Dupuydauby avait déjà livré ce même témoignage sur l'affaire Bouaké à la brigade financière qui instruisait une autre affaire. Il s'est manifesté auprès des parties civiles en février dernier en apprenant que l'instruction Bouaké n'était pas close.

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