Crise anglophone : passe d'armes entre Yaoundé et Washington
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Les autorités camerounaises accusent les Etats-Unis d’héberger des sécessionnistes et les américains pointent des « assassinats ciblés » imputés à l’armée régulière dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest.

Les 90 minutes d’entretien entre le président camerounais et l'ambassadeur des Etats-Unis d'Amérique au Cameroun, le 17 mai dernier, ont dû être tendues. Henry Barlerin révèle en effet dans une déclaration publiée après cette rencontre que les discussions avec Paul Biya ont notamment porté sur la crise socio - politique dans le Sud-Ouest et le Nord-Ouest. « Le mois d'avril s'est avéré le plus sanglant pour que les choses s'améliorent.

J'ai discuté avec le président de notre point de vue selon lequel les deux parties au conflit ne s'écoutent tout simplement pas », affirme le diplomate américain. Sans ménager les séparatistes qu’il accuse de tuer des gendarmes, d’enlever des fonctionnaires ou encore d’incendier des écoles, l’ambassadeur des Etats-Unis reproche au gouvernement camerounais « des assassinats ciblés, des détentions sans accès à un soutien juridique, à la famille ou à la Croix-Rouge, et des incendies et pillages de villages ».

Méfiance

Et d’ajouter, « Nous continuons d'appeler les deux parties à cesser immédiatement la violence », avant d’affirmer avoir « demandé au président d'utiliser son leadership pour encourager les deux parties à s'écouter les unes les autres ». La rencontre entre Paul Biya et Peter Henry Barlerin intervient quelques jours après ce qui a (plus ou moins) parasité la scénographie de réception d’un don de deux avions militaires offerts par les Etats-Unis d’Amérique. C’était à la Base aérienne 101 de Yaoundé, le 11 mai. Ce jour-là, de petites phrases débitées respectivement par Peter Henry Barlerin et Joseph Beti Assomo, ministre délégué à la présidence en charge de la Défense (Mindef), avaient tout pour prolonger le miel d’une polémique sur la crise anglophone.

Premier à prendre la parole, le diplomate américain a trouvé en cette occasion un appât commode pour circonvenir les esprits des autorités camerounaises. « Monsieur le ministre, je sais que vous m’avez rassuré à maintes reprises que les équipements et le soutien fournis par les États-Unis ne seront utilisés que dans le respect strict des termes de l’accord…

Ces deux avions sont destinés à être utilisés exclusivement dans la lutte contre Boko Haram au Nord du Cameroun… Vous m’avez assuré que les équipements fournis par les États-Unis ne seront pas utilisés à d’autres fins, dans d’autres conflits… » a insisté Peter Henry Barlerin, comme pour définir les lignes d’usage des deux aéronefs C-208 Cessna remis. Au vrai, même si le diplomate américain condamne « les discours haineux et les appels à la violence d’une très petite minorité de personnes nées au Cameroun vivant aux États-Unis », Washington interdit à l’armée camerounaise de mettre ces appareils de surveillance sous le ciel de la partie anglophone du pays, en proie à une crise sociopolitique depuis 2016. Et ce fut comme une étincelle.

Berger à la bergère

Dans son discours, Joseph Beti Assomo a fait œuvre des propos de l’ambassadeur des Etats-Unis. « Le gouvernement camerounais se réjouit de votre condamnation publique en direction de l’opinion nationale et internationale des activistes, dont les donneurs d’ordre du mouvement sécessionniste auquel notre pays fait face en ce moment, sont tapis à l’étranger, en Amérique et en Europe où ils possèdent à des levées de fonds pour venir porter la déstabilisation au Cameroun.

Nous comptons sur la coopération active de nos amis pour que leur pays ne serve pas de base de conception, d’endoctrinement, de collecte de fonds pour venir déstabiliser le Cameroun » a déclamé le ministre en charge de la Défense.

Avec le trésor de significations qu’ils insinuent, les mots du Mindef n'ont plus appelé de tact diplomatique. Pour en cerner les contours, Joseph Beti Assomo a voulu mettre à nu la bienveillance des dollars américains sans la trahir en mots clairs.

La divergence entre le Cameroun et les Etats-Unis est manifeste sur la crise anglophone. Où Washington voit un problème politique qui devrait se résoudre par le dialogue, Yaoundé appréhende la question comme une lutte contre le terrorisme et pour l’intégrité du pays.

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