Mais je pense qu'il est important que nous conservions une perspective historique chaque fois que nous parlons de notre pays. Depuis les débuts de notre fondation pour paraphraser Fabien Eboussi Boulaga, la politique camerounaise n'a jamais été une affaire particulièrement agréable. la politique camerounaise a toujours été un peu moins gentille pendant les périodes de grands changements. Notre rencontre avec le monde occidental s’est faite dans une extrême violence. La décolonisation, l’indépendance sont entachées de pires atrocités. Des têtes ont été coupées, des femmes et des enfants violés. Des noms comme Ossendé Afana, Moumié, Um Nyobè proscrits, aujourd’hui ils sont devenus des produits exotiques y compris dans les familles des concernés.

En 2009, alors que je proposais ma candidature à la présidence de la République pour l'élection de 2011, un journal du pouvoir a écrit que j'avais violé mes nièces, enfant de ma grande sœur, que je lui ai fait deux enfants. Cette année, je lis partout que je suis un homosexuel, que si je suis président je serai pire que Kennedy, pire que Dominique Strauss-Khan, sauf que le premier est le président que les Etats-Unis continuent à pleurer et le second un brillant économiste. J’ai lu que je détruirai les ménages, d'autres comme le brillant professeur du droit des médias Albert Mbida annoncent que je devrais laisser la politique pour me lancer dans le cinéma pornographique. D'autres pensent que je vais enseigner «le meurtre, le vol, le viol, l'adultère et l'inceste» (rire). Pas subtil. Que dire d’une certaine Sidoine Monkam journaliste à la télévision des Milles Collines au Cameroun qui a tout simplement mesuré la taille de mon sexe avant de la présenter à ses téléspectateurs ?

Au sein de cette télévision de Mille Collines, toujours eux, ils ont écrit et qualifié ma mère que je viens d'enterrer de «prostituée ordinaire», ils ont harcelé mes enfants de jour comme de nuit.

Mais il n'y a pas que moi ! Un vieux magistrat Paul Ayah Abine a été jeté en prison, accusé de tout, un évêque a été violé et assassiné, le peuple est resté silencieux en disant qu'il vit en paix et que l'esprit de Dieu est avec lui.

Plus les candidats se déclarent plus les boules puantes surgissent de partout et n’épargnent aucun d’eux – certains des candidats n’ont même pas le temps de proposer un programme politique aux Camerounais, occupés qu’ils sont à esquiver les coups ou à en donner.

On conteste l’expertise, on récuse la nationalité, la fortune est dénoncée, l’expertise vilipendée. Le Cameroun se trouve ainsi pris en otage et quand on sait que le Chef de l’État sortant mais toujours candidat et en service a annoncé dans son adresse à la Nation le 31 décembre 2017 que 2018 sera une année électorale, c’est à parier que nous nous acheminons vers une année sans élection avec une légitimation de l’injure publique sacralisée par les médias et les réseaux sociaux et canonisée par la justice. Ainsi va le Cameroun le pays qui n’a rien à envier à Haïti sous Duvalier, une dictature parfaite avec ses apparences de démocratie, sa prison sans murs dont les prisonniers ne songeraient pas à s’évader occupés qu’ils sont à se donner les coups les uns les autres avec une violence de toxicomans.

Oui, le Cameroun n’est plus qu’un véritable système d'esclavage où, grâce à la consommation de tout genre, au divertissement, à la boisson, au sexe et à la drogue, les esclaves auraient l'amour de leur servitude … vive l’année électorale.