Cameroun: Affaires au tribunal: les populations de Tonga tiennent la palme d’or dans le Département du Ndé.
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Cameroun: Affaires au tribunal: les populations de Tonga tiennent la palme d’or dans le Département du Ndé. :: CAMEROON

Elles représentent en valeur relative, plus de 60% des affaires enrôlées dans les juridictions et plus de 70% de ses fils incarcérés dans la prison principale de Bangangté.

C’est de trop ! Mais l’espoir est permis. Une initiative de Désiré Raphael Bitchebe, maire des céans, vise à renverser la tendance. Dans l’une de ses démarche, il a été le cerveau de l’organisation d’un atelier qui a rassemblé toutes les parties prenantes de gestion des conflits. Ce 19 septembre 2017, autorités administratives, judiciaires, municipales, traditionnelles, politiques, religieuses, les forces de maintien de l’ordre, les populations cibles, les professionnels de médias, se sont mis ensemble pour échanger et trouver les voies et moyens, à l’effet de tordre le cou à cette gangrène qui cristallise les esprits et plombe le rayonnement de la municipalité.

Le maire est plus que jamais face à son destin et à celui des populations dont il est l’un des principaux dépositaires. Son « vivre ensemble, agir ensemble », prend et l’eau. Il faut faire quelque chose. La manière par laquelle le maire entend désagréger ce substratum, est historique, d’ailleurs a été saluée par tous.

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Il s’agissait de l’« atelier de formation et de responsabilisation des auxiliaires d’administration et des agents communaux, dans leurs missions de police judiciaires ou de police municipale ». Des experts se sont ainsi retrouvés pour porter leurs voix à la sollicitation du maire. En bonne place, le président du tribunal et le Procureur de la République, près de ces tribunaux, les universitaires, tous, techniciens de droit institutionnel, des chefs traditionnels qui manipulent les droits coutumiers, les chefs de quartiers, sièges de droit de conciliation, les responsables de la commission diocésaine de justice et paix de l’Eglise Catholique, qui officient par la démarche holistique en cas de conflit et les populations qui sont souvent des victimes du verdict de l’un ou de l’autre droit.

Pour éplucher l’objet de la rencontre, la dernière parole est revenue au Procureur de la République qui a solennellement ouvert les travaux, tout en magnifiant l’importance de l’atelier et exaltant le droit pour tous. Mais avant, le maire, maitre d’ouvrage de l’implémentation de cette nouvelle ère dans sa municipalité a présenté le contexte justificatif, les objectifs globaux et spécifiques, ainsi que les résultats attendus au terme de cet atelier. Le chef du village Babitchoua, porte-parole des autorités traditionnelles a ouvert le bal des allocutions.

Après la phase protocolaire marquée par des discours et exposés, le tout sous la brillante modération du Dr Tchoumbia Tomtom Louis, chargé des cours à la faculté de droit à l’Université de Dschang, les communications du substitut du Procureur ont plongé l’assistance dans le jeu de questions-réponses. Là, c’était passionnel. Toutes les préoccupations ont trouvé des solutions. C’était tellement terre-à terre que chacun et tous ont été mis au même niveau de compréhension et d’information. La maxime « nulle n’est sensée ignorer la loi » a été respectée. Au terme, des recommandations ont été formulées, bien sûr en se greffant aux lois de la République. Il a été question d’établir des liens de collaboration étroite entre la justice traditionnelle et conventionnelle pour l’intérêt supérieur des populations cibles.

Réactions

« Aucun risque de faire disparaitre la justice institutionnelle », Jean Yves Abessolo, Procureur de la République, près des tribunaux de Bangangté.

Nous sommes tous sans ignorer que le contexte actuel s’y prête. Je salue avec déférence l’initiative du maire. Il y va de la volonté manifeste et du désir de vivre ensemble et en paix, d’une part, savoir surmonter localement les dissensions nées des conflits d’autre part.

C’est lorsque ces voies de recours sont épuisées que l’on peut porter l’affaire au niveau de la justice institutionnelle. Cette justice qui est un service public, ne doit en aucun cas, être illusoire, elle tranche les limites de la justice traditionnelle.

Le Cameroun est un pays de droit, sa justice est régit par les lois de la République. Donc même en recourant à la justice traditionnelle, il n’y a aucun risque de faire disparaitre la justice institutionnelle, c’est même un leurre d’y penser.

« Il faut saisir le taureau par les cornes », Désiré Raphael Bitchebe, maire de la Commune de Tonga

Comme vous l’avez suivi dans mon propos liminaire, les exposés de motifs sont profonds et se résument à la recherche de la cohésion sociale, en la recherche des éléments déterminants du vivre ensemble et agir ensemble qui fonde notre leitmotiv depuis le début de notre mandature en 2013.

Nous vivons un climat où les populations se tirent les unes sur les autres. Les indicateurs clés l’illustrent à suffisance. Un seul arrondissement (Tonga) sur 4 que compte le Ndé, qui représente 12% de la population globale du département, a à lui seul plus de 60% des procès enrôlés au tribunal de Bangangté, et plus de 70% de la population carcérale à la prison principale de Bangangté, sont des originaires de Tonga. Il faut saisir le taureau par les cornes et renverser rapidement la tendance. L’incohésion sociale tire ses origines de plusieurs sources, mais si nous sommes dans le cas d’une instrumentalisation, que des acteurs qui ont déjà causé plusieurs victimes, se ravisent et permettent enfin le développement de notre Commune. Mais j’ai du mal à comprendre comment un leader d’opinion au nom d’une quelconque division souhaiterait que ses frères se retrouvent en prison, car nulle ne peut se prévaloir de sa propre turpitude. Les fondements de ce que nous vivons aujourd’hui sont anthropologiques, nous continuons de payer le lourd tribut de notre participation à l’indépendance du Cameroun, il s’agit d’un peuple qui a perdu ses racines séculaires et qui se trouvent dans un « new man’s land », où tout est confondu au « new law ». C’est pourquoi il faut restituer les choses dans leurs contextes et créer la cohésion sociale, enfin que les populations s’en approprient le « vivre ensemble et agir ensemble ».

« Un tournant on peut plus décisif », S.M Tchoubia Antoine, chef du village Babitchoua

Les situations malheureuses qui ont été décriées au cours de cet atelier et qui entravent le développement de notre Commune, marquent un tournant on ne peut plus décisif pour son avenir et que nous appelons de tous nos vœux glorieux. L’initiative du maire doit être encouragée à sa juste valeur. Parce que nous l’avons trouvé opportun, nous avons fait un break dans nos multiples occupations quotidiennes pour nous joindre à l’effort du premier magistrat municipal. La mission qui nous incombe désormais sera de sensibiliser les auxiliaires d’administration que nous sommes, d’abord qu’ils s’empreignent de leurs prérogatives de police judiciaire ou police municipale, et ensuite qu’ils servent de relais à la justice institutionnelle. Je salue surtout l’adhésion populaire que cet atelier a suscitée. Des gens sont restés du début jusqu’à la fin, sans crier à la famine et à la soif. Les populations et les auxiliaires d’administration se sont ainsi abreuvés à la bonne source. C’est une nouvelle ère qui s’ouvre dans notre municipalité. Nous comptons instituer un observatoire qui va suivre les actes du présent séminaire, ainsi pour être sûrs que ce n’est pas un coup d’épée dans la marre.

« Apprendre la culture de la paix », Tchoua Maurice, président de la section Rdpc Ndé-Sud.

C’est une très bonne chose que le maire ait organisé un tel atelier. Je le place dans le cadre de l’éducation de masse. C’est une manière de dire aux populations comment éviter les conflits. Mais ce n’est pas une démarche pour changer les fondamentaux institués par les textes de la République. L’on n’oblige personne de passer par le tribunal coutumier pour arriver au tribunal civil. Ceci ne peut être qu’un moyen de pousser des citoyens de se tolérer à la base, se réconcilier. Selon moi, c’est un bon début et nous allons l’améliorer avec le temps. Il est question d’apprendre la culture de la paix, pour faire front commun à l’adversaire. Un tel atelier vise aussi la culture de l’humilité et de la reconnaissance de l’échelle de valeur. Se retrouver chaque fois dans des tribunaux reste le temps que l’on devait mettre à profit pour promouvoir le développement du pays.

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