Opération épervier : Comment le clan Bulu veut la tête de Beh Mengue
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Trêve de manipulation. Pour une enquête judiciaire ouverte à l’encontre de sa gestion, l’ancien Directeur Général de l’Art - l’Agence de régulation des télécommunications, semble déjà jugé et condamné. Mais au-delà des fautes de gestion à lui reprochés, Jean Louis Beh Mengue apparait comme la victime expiatoire d’une conspiration fratricide de ses frères Bulu, qui veulent contrôler à eux seuls le juteux secteur des télécommunications au Cameroun.

Tout semble aller très vite dans ce qui apparait comme la décapitation de l’ancien directeur général de l’Art. A peine démis de ses fonctions le 8 juin dernier, Jean Louis Beh Mengue est déjà dans les mailles broyeuses du rouleau compresseur judiciaire. Ce lundi, il est de nouveau attendu au Tcs - le Tribunal criminel spécial, à la suite d’une nouvelle convocation de cette instance judiciaire spécialisée, qui l’avait déjà auditionné jeudi dernier, soit le lendemain de sa passation de pouvoir.

Déjà, la  cérémonie de passation de service entre les Dg entrant et sortant de l’Agence avait tracé les sillons d’un enfoncement programmé. A l’occasion, Minette Libong Li Likeng - la ministre de tutelle, avait dans une démarche peu républicaine et administrativement indécente, relevé les manquements dans la passation et l’exécution des contrats passés avec certains opérateurs privés du secteur des télécommunications, comme si l’enjeu inavoué était de jeter l’ancien Directeur général à la vindicte populaire, et justifier les foudres judicaires qui depuis lors s’abattent sur sa personne.

On savait déjà les rapports tendus entre l’Art et sa tutelle, particulièrement à propos d’un titre transitoire prétendument illégalement octroyé à l’opérateur privé Vodafone. Mais en plus des rouages administratifs qui lui avaient permis d’avoir des explications de l’Art, Minette Libong Li Likeng avait-elle besoin de réveiller, dans une cérémonie publique fort courue, les ressorts d’une affaire qui relève des relations d’usage entre une administration et sa tutelle ?Se demandent certains observateurs de la scène publique camerounaise.

Toujours est-il que dans la foulée de ce lynchage public, Jean Louis Beh Mengue était invité au Tcs le lendemain, où, de sources introduites, il a été informé des probables charges qui planent sur sa tête. Des fautes de gestion de l’ordre de 8 milliards de Fcfa, consécutives à une mission du Consupe - le Contrôle supérieur de l’Etat, qui s’était déployée en 2013 à l’Art, et qui trainaient comme beaucoup d’autres rapports du Consupe, dans les tiroirs de l’administration. Combien sont-ils dans le landerneau camerounais, des gestionnaires publics contre qui des rapports plus cossus du Consupe pour faute de gestion ont été dressés et qui continuent d’humer l’air de la liberté ?

Certains autres, relevés de leurs fonctions à la suite des rapports compromettants, ont dû jouir de la liberté pendant des années avant de se retrouver derrière les barreaux. Le réveil soudain de ce rapport ne masque-t-il pas des manoeuvres inavouées ? S’étonnent encore de nombreux observateurs, ahuris par la célérité inhabituelle avec laquelle la procédure judicaire s’est mise en branle contre l’ancien Dg de l’Art.

Un crime imparfait

Selon des indiscrétions proches du dossier, ce rapport accablant indexe outre Jean Louis Beh Mengue, d’autres responsables à l’instar du Pca, d’autres directeurs de l’institution, et même l’ancien ministre des Postes et Télécommunications, Jean Pierre Biyiti Bi Essam. Mais curieusement, c’est seulement Beh Mengue qui est sur la brèche, vilipendé auprès de l’opinion, au point de perdre le bénéfice de la présomption d’innocence dont jouit toute personne pénalement poursuivie. Par ailleurs, il est de notoriété que les relations entre Camtel et l’Art n’étaient pas également au beau fixe, tout comme avec les autres opérateurs privés du secteur des Télécommunications.

Notamment  à propos de l’exploitation de certains services non autorisés à l’instar des jeux du hasard. En effet, dans un rapport rendu public par la Conac - la Commission nationale anti-corruption en janvier 2015, Camtel, autant que Mtn et Orange, doivent à l’Etat du Cameroun la rondelette somme cumulée de 170, 5 milliards de Fcfa. Une cagnotte dans laquelle la quotepart de l’opérateur à capitaux publics était estimée à 18,1 milliards de Fcfa. Dès la publication des résultats de cette mission de contrôle de la Conac, l’Art, à travers son directeur général-adjoint, avait refusé d’endosser le costume de complice de cette ardoise débitrice.

Une posture qui n’avait visiblement pas plu aux dirigeants de Camtel qui, à travers son directeur général, sont monté au créneau le lendemain pour dénoncer ce rapport de la Conac. En plus, dans ses rapports subséquents sur la situation des marchés des télécommunications au Cameroun, Camtel était régulièrement présentée comme le maillon faible, classée dernier au terme de son rapport 2015, avec seulement 1,4 % des parts du marché, en dépit des multiples perfusions financières émanant de l’Etat. Ce alors que Mtn et Orange contrôlent le marché à hauteur de 93,8 %, devant le nouveau venu Nextel, crédité de 4,66 % des parts du marché.

Suffisant pour justifier les rapports tendus entre l’opérateur historique et le régulateur, qui n’avait de cesse de rappeler à l’ordre Camtel dans ses déviances managériales longtemps décriées. Certains médias ont même annoncé que le limogeage de Beh Mengue avait été fêté par le Dg de Camtel, qui trouvait dans l’acte du chef de l’Etat un débarras d’un frère qui empêchait Camtel de tourner en rond. Et que dire de la publicité qui entoure les actes juridictionnels autour de la procédure judiciaire contre BehMengue auprès du Tcs ?

Toutes les décisions de la juridiction spécialisée sont pratiquement dans la rue, publiées sans ménagement dans les médias et les réseaux sociaux, comme si une main obscure cherchait manifestement à noircir l’image de l’ancien Dg ou à défaut, de mettre la pression sur la justice. Des agissements qui trahissent un crime imparfait, dont est victime celui qui 18 ans durant, était aux commandes de l’Art sans que personne n’ose remettre fondamentalement en cause sa gestion. Conspiration ? Rira bien qui rira le dernier.

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