Vol et agressions : donner le minimum aux jeunes du Cameroun pour leur survie
CAMEROUN :: SOCIETE

Vol et agressions : donner le minimum aux jeunes du Cameroun pour leur survie :: CAMEROON

Plus ils sombrent dans le désespoir, des jeunes  prennent parfois le risque de poser des actes répréhensibles qui  peuvent leur coûter soit  la vie, soit la liberté. 

Récemment, au lieu dit «  Entrée de la gare »  de Bessengué à Douala, deux  jeunes hommes  roulant à bord d’une moto, arrachent le téléphone portable d’une jeune fille. A ses cris de détresse, une meute de motos taximen prend lesdits voleurs en chasse. Maitrisés seulement à quelques mètres du lieu du forfait, les deux jeunes sont tabassés avec une rare violence  par la foule en furie. Le supplice  des deux voleurs  ne prendra fin qu’avec l’arrivée de la police qui les embarque aussitôt manu militari. 

Cette scène traduit avec douleur, le désespoir dans lequel les jeunes de notre pays sont plongés.   

Quand on sait qu’actuellement  au Cameroun, un téléphone portable coûte  à partir de  15000 Cfa en montant, selon la marque, on peut s’étonner  que ces jeunes, au lieu de faire un petit métier susceptible de leur donner  cette  modique somme, aient choisi  de  voler ce qui ne leur appartient pas. 

C’est un cliché qui signifie que les  jeunes de notre pays ne  croient plus en rien. 

On a récemment déclaré que des structures de lutte contre le chômage font du bon boulot. Mais on se demande à qui ces structures donnent-elles les emplois ? Conséquence, la jeunesse n’a  plus la conviction que leur pays le Cameroun est le lieu par excellence où ils peuvent trouver  un emploi. En réalité, malgré les discours abstraits qui nous parlent de ce dont nous ne voyons pas,  l'environnement n'incite guère à l'optimisme. Ici et là,  de jeunes chômeurs peuplent les quartiers  de nos villes et multiplient parfois des actes répréhensibles pour extérioriser leur mal être.

Le calvaire des sans emploi et chômeurs ne fait que s'accentuer. 

Des milliers de jeunes non scolarisés errent à longueur de journée dans les quartiers, tandis que d’autres jouent aux cartes. Ceux qui sont  scolarisés accèdent peu aux études supérieures. L'infime partie qui réussit à décrocher un parchemin universitaire rejoint sans autre issue, la foule des diplômés sans emploi conducteurs de motos taxis   dans les villes de  Douala et  de Yaoundé. Des jeunes pourtant promus à un bel avenir attendent désespérément une hypothétique embauche, et finissent par sombrer dans la drogue, l’alcool,  le petit et le  grand banditisme. 

Il n'est pas malhonnête de dire que la jeunesse camerounaise est délaissée à elle -même. Mais d'un autre côté, il n'est pas faux de dire que les jeunes  n'acceptent  pas l'effort  qui conduit vers le vrai bonheur. Et pourtant, chaque jeune devrait  travailler  pour obtenir ce qu’il n’a  pas. Les jeunes  doivent  construire eux-mêmes leur bonheur, au lieu de fonder leurs espoirs sur des promesses fallacieuses. Ce n'est pas  dans le vol à l’arrachée  que se trouve la joie de vivre. Si la jeunesse de notre pays se  résigne  à attendre tout  des politiques qui ne les  nourrissent que d’illusions, alors un bel enfer  leur est  assuré.

Délinquance

La  dégradation de la  mentalité des jeunes a pour conséquence directe le chômage, lequel peut contribuer à faire naître une délinquance ou une violence d’acquisition, résultant notamment d’une jalousie envers les possédants, doublée d’une envie de leur ressembler. Selon les sociologues, la violence d’acquisition est générée par la société de consommation, omniprésente dans le monde moderne. Les valeurs auxquelles se réfèrent la plupart des jeunes des quartiers sont largement inspirées par l’idéal de consommation, de progression individuelle, de standing, de reconnaissance par l’apparence, de réussite rapide accessible à tous et sans préalable requis. Ce sont elles qui incitent les jeunes à porter tel vêtement ou telle marque,  à exhiber  son  téléphone portable dernier cri pour être reconnus ou respectés. Le désœuvrement des jeunes des quartiers est lié à ce qu’une partie d’eux ne trouve pas de travail, nous l’avons dit, mais il est surtout lié à ces formes pathologiques du malaise social.

On a déjà évoqué cette jeunesse bouillonnante d’énergie qui ne sait pas quoi faire d’elle-même. Ne pas savoir quoi faire de soi peut paraître bénin, mais il y a des âges et des situations où ce désœuvrement peut se révéler dangereux. A cause de l’impuissance et de l’anonymat, on peut être saisi d’accès meurtriers, de volonté de foncer pour faire de la place autour de soi en vue d’espérer trouver la sienne. La violence et l’excitation qu’elle engendre sont des remèdes à l’ennui. Quand on a l’impression de ne pas avoir d’avenir et lorsqu’on manque d’espoir, la violence est un excellent succédané et une façon de se sentir exister. Car elle fait vibrer, procure des sensations riches, des émotions fortes, et elle donne l’illusion d’exister aux yeux du monde, particulièrement à ceux des copains et de la cité.

Dans cette optique, les bagarres entre jeunes ou les affrontements avec la police peuvent être le catalyseur puissant de toutes les frustrations. Celles-ci peuvent déboucher sur des formes plus inédites de violence, violences de dégradations ou vandalisme. Ces formes sont probablement les plus inquiétantes,  car elles s’appuient sur la rage qui emporte tout sur son passage et ne trouve sens que par la haine qui vient l’alimenter. Ces violences dures et démonstratives puisent leurs sources et trouvent leurs héros dans des conduites viriles et machistes où sévissent la loi du plus fort et celle du talion.

Parmi les  maladies sociales qui ruinent les jeunes, on peut citer  la dépression. La dépression, sur le plan social, se traduit par un manque d’estime de soi, par un sentiment d’inutilité sociale, l’absence de sens et de projet. L’échec scolaire et professionnel si marqué dans les quartiers populaires est renforcé pour ces jeunes par des discriminations vécues ou ressenties.  Le mépris, les dévalorisations, les injustices contribuent à ancrer ces jeunes dans une représentation d’eux-mêmes comme victimes persécutées, qui auraient, de ce fait, d’autant plus de légitimité à persécuter à leur tour à commettant ici et là des agressions.

Lire aussi dans la rubrique SOCIETE

Les + récents

partenaire

Vidéo de la semaine

évènement

Vidéo


L'actualité en vidéo