Cameroun, Mai 1955 - Mai 2017 : Il y a soixante-deux ans le Kamerun sombra dans les ténèbres...
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Cameroun, Mai 1955 - Mai 2017 : Il y a soixante-deux ans le Kamerun sombra dans les ténèbres... :: CAMEROON

Après la Première Guerre mondiale, le Kamerun jadis protectorat allemand fut confié par la Société des Nations (SDN) aux Français et Anglais vainqueurs de l’Allemagne impériale. Ce mandat de la SDN, évolua en Tutelle des Nations Unies (ONU) en 1946. Après la Conférence de Brazzaville de 1944 qui autorisait la constitution des syndicats et plus tard des partis politiques dans les Territoires d’outre-mer, au Kamerun, de multiples associations syndicales et partis politiques naquirent. Le premier d’entre eux, l’Union des Populations du Cameroun, après des obstacles administratifs, nait le 10 avril 1948.

Après de longues décennies de misères, d’exploitation féroce soumettant des Africains sous le régime colonial ou d’indigénat, un vent violent et légitime de libération soufflait désormais sur toute l’Afrique. Au Kamerun, l'Union des populations du Cameroun s'est donné la mission et l'ambition d'incarner cette aspiration légitime des peuples à l'autodétermination et la réaffirmation de leur dignité. L’Union de Populations du Cameroun (UPC) se fixa dès lors comme objectifs : Unification, Indépendance et élévation du standard de vie des populations. Des Kamerunais considérés, naguère, comme amorphes, apolitiques où impréparés à la gestion de leur pays, s’impliquèrent massivement et valablement dans la quête des objectifs proposés par l’UPC.

Rappelons qu’en 1946, la France se permit d’inclure unilatéralement le Kamerun, pays sous-tutelle de l’Onu à lui confié par l’instance internationale, comme territoire faisant partie intégrante de la France. Les Nationalistes kamerunais se battront avec succès à l’ONU, afin que cette usurpation soit annulée. Ainsi par des milliers de Militants et de Sympathisants que l’UPC développera des multiples campagnes de ses objectifs sur toute l’étendue du territoire national. A telle enseigne qu’à l’orée de la levée de la Tutelle, l’UPC finit par devenir incompressible, malgré tous les obstacles administratifs dressés sur son chemin.

La France coloniale et fasciste prit malheureusement, en Mai 1955, la décision de briser l’Union des Populations du Cameroun dans un grand bain de sang. Bannis et pourchassés sur toute l’étendue du territoire, les militantes et militants du parti nationaliste seront contraints de se réfugier pour certains au Kamerun occidental, pour d’autres dans les brousses du Kamerun Oriental. Mêmes dans ces refuges, ils seront attaqués et assassinés. Dès lors, dans l’impréparation totale, pour leur survie, les Nationalistes prendront la lourde décision historique de défendre leur indépendance, les armes à la main. D’où la naissance des maquis.

Même au maquis, son leader Ruben Um Nyobé ne cessera de tendre la main à l’Etat français par des messages devant rétablir la paix et la concorde au Kamerun. Face au refus de reddition pure et simple des Nationalistes, la France accentuera une répression sanguinaire, qui aboutit à l’assassinat d’Um Nyobé, le 13 septembre 1958 à Boumnyébel.

Nous savons aujourd’hui que la décision de briser l’UPC dans le sang fut nécessaire pour l’Etat fasciste français, parce que les Nationalistes kamerunais militaient pour une indépendance réelle et totale. Pierre Mesmer reconnaitra que : « La France accorda l’indépendance à ceux qui la réclamait le moins, après avoir éliminé politiquement et militairement ceux qui la réclamaient avec le plus d’intransigeance.» (1). L’indépendance fut accordée aux compatriotes qui acceptèrent le néocolonialisme.

Le refus effronté et éhonté de l’Etat fasciste français de négocier la levée de Tutelle avec les Nationalistes kamerunais, qualifiés de « communistes », fit basculer le Kamerun dans les ténèbres du néocolonialisme jusqu’aujourd’hui. Des massacres de mai 1955 jusqu’à l’assassinat en janvier 1971 de Ouandié Ernest, dernier chef historique de l’UPC, l’Etat français a aujourd’hui envers le peuple martyr kamerunais : un contentieux historique.

Pour la concorde et la paix entre les nations, nous interpelons l’Etat français, selon la promesse de l’ancien président français François Hollande, à ouvrir toutes les archives du Kamerun, encore en sa possession et même l’Etat néo colonial de Paul Biya. Effectivement, du côté français, une rencontre serait en vue. Mais, les héritiers des nationalistes kamerunais, précisent : l’ouverture des archives n’est pas seulement un fait intellectuel ou administratif, mais un moment politique…

A l’occasion du Soixante dixième anniversaire de l’amnistie du 8 mai 1945, François Hollande déclarait : « l’Histoire n’est pas une nostalgie, c’est une leçon pour l’avenir. (…). Aujourd’hui nous voulons transmettre la mémoire. »

-1- Pierre Mesmer, Les Blancs s’en vont. Récit de la décolonisation. Albin Michel. P, 115

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