Cameroun: Le 11 avril 1917 était pendu Many Ewondo Barthélémy-Léon, le 11 avril 2017 un siècle déjà. Nous nous souvenons.
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Cameroun: Le 11 Avril 1917 Était Pendu Many Ewondo Barthélémy-Léon, Le 11 Avril 2017 Un Siècle Déjà. Nous Nous Souvenons. :: Cameroon

Aujourd’hui 11 avril 2017 marquons un temps d’arrêt. Nous commémorons le siècle de la pendaison de notre arrière-grand-père, grand-père, Many Ewondo, chef Mvog Ada, par l’armée coloniale allemande. Alors qu’elle a déjà perdu la guerre, qu’elle se retire du Cameroun, l’armée allemande, ici dans cette ville visage, fit arrêter nos parents et leur passa la corde au cou dans une guerre qui avait commencé loin des terres ewondo et qui allait faire en 4 ans 18 millions de morts en Europe et un nombre non calculé chez ici.

Nous avons encore de belles lettres de notre histoire à écrire même si elles sont tristes et douloureuses. La pendaison de Many Ewondo Barthélémy-Léon qui demanda le baptême avant de se voir passer la corde autour du cou n’a pas interrompu le cycle de violence dans notre pays, l’horreur s’est poursuivie mais cette pendaison a marqué les esprits et les cœurs, nous a fait prendre conscience de qui nous sommes, c’est-à-dire une famille en premier, un peuple ensuite, une résistance et une fierté pour toujours.

Le 11 avril 1917 jour triste, jour sinistre où dans la précipitation, Many Ewondo fut mis en terre – mais jour de la naissance d’un peuple de guerriers voilà pourquoi le 11 avril 1917 restera malgré tout, un jour de joie pour beaucoup de nos concitoyens d'alors, mais une joie altérée par l’éclatement de la famille dont les membres furent traumatisés et se dispersèrent d’abord dans les environs mais ensuite à Akono puis Kribi. Mais ils n’oublièrent point notre histoire, ils n’oublièrent jamais que cette guerre fut aussi un drame pour tout le Cameroun qui n'allait jamais s'en relever et que la seconde guerre mondiale allait achever. Il n'est, en effet, jamais inutile de rappeler, que si le 11 avril 2017 un jour de Victoire pour le Cameroun, libéré de l’Allemagne, la France et l’Angleterre n’entrèrent pas ici en vainqueurs même si nous dûmes attendre encore plus de 40 ans pour proclamer notre indépendance.

Gerard Essomba Many Ewondo a voulu nous réunir, nous rappeler d’où nous venons afin que nous puissions tracer le chemin du futur, le nôtre, celui de nos enfants et des enfants de nos enfants. Merci pour la générosité de votre présence. Gérard Essomba Many nous a réuni pour nous transmettre le flambeau, nous avons désormais la responsabilité d'entretenir le souvenir de toutes les victimes et de leurs familles dont les vies furent brisées au nom et pour notre liberté, notre libération. Et nous savons bien qu'il ne suffit pas de nous rassembler ici, il s’agit d’inventorier, de trouver les noms, les lieux de sépulture voilà pourquoi nous avons apposé ces plaques au nom de notre famille mais aussi au nom de ceux et celles qui aiment l’histoire. Il nous appartient, plus que jamais, dans ce Cameroun périlleux dans lequel nous vivons d'aller plus loin, d'associer et de conjuguer le souvenir des victimes avec la connaissance des causes, des circonstances et des conséquences de cette triste période de notre histoire. C'est un devoir pour la Mémoire et donc pour l'Avenir de nos enfants. Il est, en effet, toujours nécessaire d'expliciter en quoi la connaissance du mécanisme qui a mené à l’accueil, à l’installation des allemands. Il est important de savoir que les nôtres ont résisté, certains ont survécu, d’autres ont été pendu. La graine qu’ils ont semée porte encore du fruit aujourd’hui.

Un autre de nos devoirs, est d’éviter à notre génération des dérives qui menèrent du patriotisme à une caricature nationaliste peut, peut-être, éviter à notre temps de nouveaux et terribles drames. Comme beaucoup d'entre-nous, je fais partie de ces générations qui ont eu la chance d'arriver à l'âge que j'ai sans connaître ni subir une guerre de peuple contre peuple, clan contre clan. Cela nous donne, et cela me donne, des responsabilités encore plus grandes à l'égard des générations qui, les unes après les autres, ont vu leurs rangs décimés sur tous les champs de bataille des guerres qui nous opposèrent aux colons ou encore qui opposent encore aujourd’hui des hommes et des femmes d’un même pays.

Cela nous donne aussi collectivement des responsabilités particulières à l'égard de ceux de nos concitoyens qui, aujourd'hui encore, risquent leur vie et, pour certains, la perdent sous l'uniforme de nos armées et au nom du Cameroun, je pense à ces jeunes hommes dans le Nord du Cameroun qui défendent nos valeurs, celles de la paix, du travail et de la patrie. Combattants de la Paix, ils sont morts et ils meurent en son nom, prenant ainsi leur place dans cette douloureuse continuité des victimes que nous honorons, sans oublier non plus celles et ceux, policiers et gendarmes, qui perdent la vie dans l'exercice de fonctions de défense de notre vie sociale et sociétale contre des violences qui, de plus, en plus nous menacent au quotidien. Ici à Mvog Ada, ici à Yaoundé, ici au Cameroun, aujourd'hui comme hier, c'est en nous battant pour la Paix, la sécurité, la justice et la Liberté que nous sommes fidèles à la mémoire de ceux dont les noms sont gravés dans nos cœurs et que nous espérons porter sur tous des Monuments.

 

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