Cameroun: Fondements et solutions possibles de la crise du Nord-ouest et du Sud-ouest.
CAMEROUN :: POINT DE VUE

Cameroun: Fondements Et Solutions Possibles De La Crise Du Nord-Ouest Et Du Sud-Ouest. :: Cameroon

A présent que les uns les autres ont bien vomi leur bile, et que les clowns sécessionnistes jusque-là ignorés, et qui ont trouvé enfin dans « Cameroon_politics » et Facebook une tribune idéale, ont suffisamment crâné et sont convaincus enfin que l’avenir leur appartient, il nous faut tirer les enseignements de cette chamaillerie de plusieurs jours, et faire des projections pour l’avenir.

Misère, ignorance, mauvaise foi et opportunisme :

le véritable problème.

Tout le chahut qui s’est produit autour de la crise du Nord-ouest et du Sud-ouest n’a qu’une origine : la misère. Un proverbe de la région du Sud dit bien à propos : « le chien affamé a fini par mordre ». Traduction, s’il avait eu le ventre rempli, le chien ne l’aurait pas fait. C’est parce que les routes du Cameroun sont mauvaises, que les écoles sont insuffisantes, qu’il n’y a pas de travail, que les gens ne mangent pas à leur faim, que les gens éprouvent d’énormes difficultés à nourrir leur progéniture, qu’ils ne parviennent pas à se loger dans des maisons confortables, etc., etc., etc., ajouté à l’ignorance, à la mauvaise foi, et, par-dessus tout, à l’opportunisme de certains couillons qui trouvent là une occasion de devenir enfin des « leaders », que des Camerounais en arrivent à incriminer ceux des régions différentes de la leur. Cheikh Hamidou Kane disait si opportunément : « la misère est le plus grand ennemi de Dieu sur terre ». Si la misère détruit un couple, une famille, les enfants ne respectent plus leurs parents parce que ces derniers sont démunis, les cadets ne respectent pas leurs aînés parce que ceux-ci sont pauvres, que peut-il alors en être d’une nation ?

A cette réalité pénible à accepter s’ajoutent de graves fautes politiques commises par le gouvernement camerounais depuis 1960, sur lesquelles il n’est plus nécessaire de revenir, tellement elles ont, ces deux dernières semaines, été étalées au grand jour.

Enfin, la médiocrité de notre classe politique, toute tendance confondue, majorité comme opposition, couronne le tout. Alors que sous d’autres cieux, les politiciens réfléchissent sur le devenir de leurs pays, au Cameroun, les nôtres s’échinent à faire du chantage au Président de la République pour occuper de grands postes au sein de l’Etat. La conférence de Foumban, en1961 a échoué à cause de cela. Tout le monde est rentré satisfait, les

« Anglophones » en premiers, chacun ayant obtenu un poste, ou maintenu ses privilèges. Trente années plus tard, la « Conférence tripartite », en 1991, également, a connu le même destin. Les plus grands brûleurs de pneus dans nos villes tout au long de l’année 1991, y ont à leur tour obtenu des postes, et sont aujourd’hui, pour un grand nombre d’entre eux, d’acharnés défenseurs de Paul Biya qu’ils abreuvaient sans retenue aucune d’injures hier. On le voit encore aujourd’hui, de grands promoteurs du séparatisme au Cameroun, se gardent bien de commencer par démissionner de leurs hautes fonctions où ils sont grassement rémunérés par cet Etat dont ils ne veulent plus, dont ils prônent la séparation. Au contraire, ils désirent même, à travers le vacarme qu’ils produisent, obtenir des postes plus importants encore, puisque cette action a déjà payé par le passé. Et ceux qui font du chahut en Amérique, se voient déjà atterrissant à l’« International Limbe Freedom Airport », accueillis par une foule en liesse, le drapeau du nouvel Etat qu’ils sont enfin parvenus à arracher aux détestables « francophones », au vent.

Les enseignements.

Quoi qu’il en soit, il faut se tourner vers le futur. Mais, celui-ci nous amène à tirer d’abord au moins six grands enseignements :

1/- il ne sert à rien d’arguer que toutes les régions du Cameroun connaissent les mêmes problèmes ; les Camerounais sont beaucoup trop égocentriques et tribalistes pour l’admettre ; ils sont convaincus que les autres régions « trompent » la leur et que les autres tribus vivent mieux que celle à laquelle ils appartiennent ;

2/- il ne sert à rien de gaspiller sa salive à faire comprendre aux Camerounais que s’identifier aux langues coloniales que sont le français et l’anglais c’est continuer à demeurer mentalement colonisés ; ils proclament fièrement tels des perroquets, à savoir sans réfléchir, que leur pays est « bilingue » et « biculturel », anglais-français ; ils ne se rendent pas compte de la stupidité de cette affirmation, car chaque Camerounais est au minimum trilingue, il parle français, anglais, et au moins sa langue régionale, ce qui fait trois langues déjà, sans oublier le fait qu’il baragouine l’espagnol ou l’allemand appris au lycée, plus le pidgin, dans certains cas, il se retrouve ainsi à cinq voire six langues ; parfois, il baragouine encore deux ou trois langues régionales, ce qui fait huit à neuf langues ; les Camerounais ne sont pas « bilingues », ils sont « multilingues », mais le comprennent-ils ?

3/- il ne sert à rien d’énumérer les postes occupés par les uns les autres, car le véritable poste convoité, mais malheureusement difficile à obtenir, est celui de Président de la République ; l’histoire de notre pays est riche d’enseignement sur ce plan ; lors du débat sur le statut du Cameroun au

sein de l’Assemblée Territoriale du Cameroun, ATCAM, élue le 23 décembre 1956, les élus du Nord, regroupés au sein du groupe parlementaire de l’« Union Camerounaise », pour calmer leur désir de sécession avec le Sud qu’ils manifestaient publiquement au point où le rapport de la mission de visite des Nations Unies d’octobre 1955 en avaient longuement fait mention, ont exigé que leur région soit dotée d’un statut autonome au sein de l’Etat du Cameroun qui a vu le jour le 16 avril 1957 ; c’est ce qui a été fait ; mais aussitôt qu’un ressortissant du Nord est devenu Premier ministre, Ahmadou Ahidjo, le 18 février 1958, en remplacement de Mbida André-Marie, un Sudiste, d’une part, les élus du Nord ont abandonné toute idée de sécession, et d’autre part, ils ont demandé la modification du statut du Cameroun du 16 avril 1957, avec abrogation de l’autonomie de leur région ; ils se sont mis à militer pour un Cameroun un et indivisible (les jeunes générations de Camerounais ne connaissent pas cet épisode de l’histoire de notre pays)…

4/- l’Etat hyper-centralisé que nous ont imposé les Français en 1960, car à partir de celui-ci, il leur suffisait de contrôler le Président de la République pour contrôler le pays tout entier, est à l’origine du mécontentement général des Camerounais actuel, dont la manifestation suprême est le discours séparatiste que développe une poignée de comiques réfugiés en Amérique, et qui disposent de relais locaux ;

5/- la rotation de personnes au gouvernement est sans effet pour la population si au niveau suprême, un même personnage trône pendant presque quarante ans ; cette trop grande longévité, au-delà de la sclérose qu’elle engendre dans le pays, devient inévitablement source de troubles, car c’est à ce niveau que les Camerounais ont véritablement besoin de rotation. Il faut en effet avoir le courage de se poser la question suivante : si Tandeng Muna Salomon était devenu Président de la République, après dix ans de pouvoir de Paul Biya, c’est-à-dire par exemple en 1992, le discours séparatiste actuel prospérerait-il encore ?

6/- il faut s’accommoder de l’existence d’un mouvement séparatiste qui ne cessera en aucun jour de s’agiter, qui fera toujours du vacarme, mais qui jamais ne parviendra à ses fins, tout simplement parce qu’il n’en aura jamais les moyens, ni politiques, ni militaires ; d’autres pays possèdent de tels infatigables et téméraires agitateurs, France, Espagne, Russie, Turquie, etc., et ne s’en portent pas plus mal.

Le futur après la crise.

Que faire donc à présent ? Il faut prendre, au moins quatre grandes et courageuses décisions :

1/- il faut abolir le Cameroun « bilingue » et « biculturel » actuel, car celui-ci a, non seulement déjà fait son temps, mais, plus grave, a finalement divisé le pays plutôt que de l’unir ; il faut passer à un autre Cameroun, au Cameroun réel, qui est celui du multiculturalisme, du multilinguisme ; il faut sortir de cette fiction d’un Cameroun aux contradictions internes à ne prendre en considération uniquement que par des nominations dans l’administration publique et au gouvernement ;

2/- ce Cameroun nouveau, passe impérativement par la naissance effective de plusieurs pouvoirs exécutifs locaux élus, ce qui n’est pas source de séparatisme, au contraire ; à la fin de la guerre de sécession du Biafra, par exemple, 1967-1970, le Nigeria, plutôt que de réduire son nombre d’Etats, l’a même plutôt triplé, il est plutôt passé de douze (12) à trente-six (36), voici 46 ans que cela s’est produit, et il n’a toujours pas éclaté ; l’appellation importe peu, Etats ou « régions », « fédéralisme », « provincialisation » ou « régionalisation »,ce qui compte, c’est la naissance d’exécutifs locaux, l’abolition de gouverneurs nommés depuis Yaoundé ; il doivent être contrôlés dans leur activité par des assemblées locales également élues comme lui au suffrage universel direct ;

3/- il faut naturellement élaborer une nouvelle constitution pour cela, celle actuellement en vigueur ne permet pas de telles réformes fondamentales et révolutionnaires ;

4/- enfin, il faudrait « démonarchiser » la fonction présidentielle, son statut actuel est inévitablement source de conflit, car le pouvoir de tout le pays est accaparé par une seule personne ; si cela n’est pas fait, quiconque succédera à Paul Biya, sera l’objet des mêmes critiques que lui, face aux Camerounais, aujourd’hui.

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