Jean marie NgondjiBangangte : Que Jean Ping reconnaisse qu’il a perdu cette élection présidentielle
GABON :: POLITIQUE

Gabon :: Jean Marie Ngondjibangangte : Que Jean Ping Reconnaisse Qu’il A Perdu Cette Élection Présidentielle

L’expert électoral international et doyen des observateurs de retour du Gabon parle du climat social qui y règne.

Quelle est la situation qui prévaut au Gabon en ce moment?
La situation au Gabon aujourd’hui est vraiment dramatique parce que l’attitude des gabonais après le résultat n’est pas bonne. Les gabonais sont descendus dans la rue, à Libreville, à Franceville et dans d’autres villes pour casser des magasins et ils ont même incendié l’assemblée nationale. Ce n’est pas une bonne chose parce que ce que les gabonais détruisent aujourd’hui a été construit par les gabonais. C’est regrettable parce que quelqu’un a perdu les élections et demande aux gens de descendre dans la rue pour casser. Ce sont des gestes condamnables et c’est de l’incivisme total.

Les magasins sont-ils ouverts et est-ce que les gens vaquent à leurs occupations ?
Oui, timidement. Avant que je ne quitte le Gabon il y avait quelques taxis qui circulaient, mais la ville était complètement morte à 90%. Aujourd’hui, j’ai appelé (hier, ndlr) au Gabon et on m’a fait savoir que les gens vaquent peu à peu à leurs occupations. Et on espère que progressivement, le calme va revenir parce que devant les boulangeries, les gabonais s’alignent en file indienne pour acheter du pain. L’hôtel dans lequel je logeais n’avait plus de nourriture à mon départ. À cette allure, la crise qui prévaut ne va pas tuer les gabonais mais la famine s’en chargera.

On a vu beaucoup de Camerounais quitter le Gabon est-ce que la vie des étrangers est menacée?
Non ! Le Gabon est une terre d’accueil et d’hospitalité. Il y a plusieurs Camerounais qui vivent au Gabon et y travaillent. C’est le cas des africains des autres sous-régions comme ceux de l’Afrique de l’Ouest. Aujourd’hui qu’il y a des troubles, ce n’est pas seulement la vie des Camerounais qui est en danger, mais aussi celle des gabonais et des autres communautés. C’est tout à fait normal que ceux qui ont eu peur, de sortir du Gabon pour préserver leur vie. Je ne pense pas qu’ils soient sortis massivement comme vous le dites. Si c’était le cas, je pense que le Président Paul Biya aurait envoyé un avion. Par où seraient-ils sortis? Les véhicules et les avions sont en arrêt. Je sais que beaucoup ont pris peur comme moi et je me suis empressé de sortir le plus tôt possible.

Les observateurs de l’Union européenne ont déclaré qu’il y a une anomalie évidente dans les résultats proclamés. En tant qu’observateur quelle est votre position?
L’Union européenne est une organisation que je respecte beaucoup mais elle a une méconnaissance de la géopolitique africaine. Ils disent des choses qui ne sont pas vraies. Et je ne sais malheureusement pas pourquoi? Au cours de cette élection présidentielle gabonaise, l’Union européenne n’était pas le seul observateur, il y’avait aussi l’Union africaine, la Cac, Cemac, la société civile africaine, les ONG qui ont aussi qualité et compétence dans le domaine d’observation des élections. Pourquoi l’Union européenne serait la seule à trouver qu’il y a problème ? Tout le monde a reconnu à l’exception de cette Union européenne a reconnu que les élections se sont bien déroulées. Les gabonais sont sortis très tôt pour s’aligner et remplir leur devoir civique.

Il y a un candidat qui déclare avoir eu 105% dans une région et un autre 95% dans une autre, de tels résultats sont-ils possibles?
Si vous parlez du haut-Ogoué, c’est le fief de Bongo père, et maintenant celui de Bongo fils, raison pour laquelle les populations sont sorties massivement pour le voter. Jean Ping les a stigmatisés en les traitants de cafards et de toute chose. N’oubliez pas qu’en Afrique, le vote est ethnique au Gabon tout comme au Cameroun. Après cela, même ceux qui étaient malades ont fait l’effort de se lever pour aller voter, ce qui explique ses 99%. Et, de tels chiffres ne sont pas nouveaux là-bas surtout en ce qui concerne les Bongo. 105%, c’est extraordinaire et cela traduit sans réserve une fraude. D’un autre côté 95% de suffrage accordé à Ali Bongo ne devrait étonner personne. Cela a été le cas avec Bongo père. J’ai beaucoup de respect pour l’Union européenne mais je voudrais lui demander de respecter le vote des gabonais et des africains, et dans la mesure du possible qu’ils apportent des preuves de ce qu’ils affirment.

Ne pensez-vous pas que l’histoire semble se répéter par rapport à ce qui s’est passé en Côte d’Ivoire en 2010?
C’est le même scénario qu’en Côte d’Ivoire en 2010 mais le risque de guerre civile est négligeable. J’espère que les chefs d’états africains vont se lever et soutenir leur cadet et qu’ils ne vont pas abandonner Ali Bongo comme ils l’on fait avec Laurent Gbagbo. Je pense aussi que l’Union africaine qui est une institution continentale reconnue doit mener une médiation pour les choses pour que les choses se passent correctement et biens. Au Gabon, il n’est nul part inscrit concernant les élections dans la Constitution de recompter les bulletins bureau par bureau après la proclamation. S’il y a des contestateurs, ils doivent saisir la Cour constitutionnelle ou la Cour pénale qui doit plancher sur l’affaire. L’une des deux entités ne le fera que si elle le trouve nécessaire. Ce n’est ni à la France, ni aux États- Unis ou encore à l’Union européenne de le faire. Aux États-Unis, pendant l’élection présidentielle, en Floride, ils ont tergiversé pendant deux mois avant de proclamer les résultats et on sait tout ce qui s’est passé mais on ne va pas entrer dans les détails. En Côte d’Ivoire, la loi prévoyait de recompter les bulletins, Laurent Gbagbo l’avait demandé à Jean Ping, qui était à cette époque président de la commission de l’Union africaine de le faire et il a dit non. Le représentant de Ban Ki Moon et la France ont dit non! Aujourd’hui, cette communauté internationale nous demande de recompter les voix dans un pays où la loi ne l’a pas prévu. Je dis non et non. Tout ce qu’on doit faire, c’est de respecter ce qui est prévu par la loi au Gabon  

Il y a les législations législatives en fin d’année au Gabon, quel est pour vous le scénario prévisible?
Il faudrait déjà que Jean Ping reconnaisse qu’il a perdu les élections. Il faut qu’autour d’une table, que les deux fils gabonais trouvent une solution au problème. Que le gagnant ne soit pas complètement le gagnant et que le perdant ne soit pas complètement le perdant. Que le gouvernement soit un gouvernement d’union nationale. Après on verra pour les législatives en décembre 2016. L’Union africaine devrait essayer de faire entendre raison à Jean Ping en acceptant les résultats. Ce dernier a eu la maladresse de s’autoproclamer président avant les résultats et ce, sans tous les procès-verbaux.

Aucun chef d’Etat de la sous-région n’a pour l’instant félicité Ali Bongo, cela ne prouve-t-il pas qu’il est délaissé par ses pairs?
Je pense que les chefs d’états de la sous-région Afrique centrale sont des chefs d’états mûrs, pleins de sagesse ainsi que de beaucoup d’expérience. Je regrette juste que leurs félicitations ne soient pas à ce jour envoyées à monsieur Ali Bongo qui a gagné les élections. Ils doivent probablement attendre que la Cour constitutionnelle qui est un organe habilité à trancher les contentieux électoraux reconnaisse la victoire d’Ali Bongo, l’élu. J’espère que ce sera fait le plus tôt possible. Les africains sont matures et le Gabon est un état indépendant avec ses lois depuis 1960. Il est donc inacceptable aujourd’hui de demander à un président de transgresser les lois dont il est garant.

Un responsable français affirme ne pas avoir de nouvelles de certains ressortissants et la France s’apprête à y envoyer un contingent de militaires, sont-ils en danger?
Non! Il n’Ya pas que des français au Gabon. Ceux dont-on parle sont peut-être des Franco-gabonais ou des gabonais-français, en tout cas ils ont une double nationalité. S’ils sont des vandales et qu’ils nuisent à l’intégrité du pays, il est tout à fait normal qu’on les interpelle et qu’ils répondent de leurs actes. Le Gabon est un pays souverain et un pays qui a ses lois. Je pense que n’ai vu aucune troupe française.

Lire aussi dans la rubrique POLITIQUE

Les + récents

partenaire

canal de vie

Vidéo de la semaine

évènement

Vidéo


L'actualité en vidéo