NGAOUNDÉRÉ : L’hôpital régional dans le coma
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Les bâtiments et le plateau technique sont vétustes, 90% du personnel est «non-qualifié».

Posté en face de l’hôpital régional de Ngaoundéré, Ismaila, la quarantaine, attend sa fille. Il regarde de gauche à droite, scrutant ce 18 août 2016, toutes les motos qui déposent les clients. Les minutes passent. Les gens vont et viennent. Les cris des enfants se mêlent à cette ambiance de vrombissements de motos. Soudain, lsmaila laisse échapper un sourire.

Sa fille est arrivée à bord d’un de ces engins. Elle descend à l’entrée de l’hôpital. Son père la rejoint. Le tandem échange quelques mots, avant de rentrer dans l’établissement hospitalier. Ici, c’est la désolation qui les accueille. Malgré les plaques indiquant les différentes directions à prendre, le père et sa fille semblent perdus. Ils jettent leurs regards en direction d’un bâtiment dont le toit a disparu. Une fumée s’y dégage. Ses murs sont dégarnis.

Deux chiens, apparemment égarés, prennent la direction d’un autre bâtiment, tout aussi triste que le précédent. A en croire l’écriteau en contreplaqué adossé sur ce bâtiment défraîchi, la bâtisse abrite le restaurant. A partir du rideau effilé blanc et vieilli, on aperçoit des assiettes entreposées sur les tables. Devant un autre bâtiment, les gens sont alignés en file indienne. Plus loin, on aperçoit un autre édifice assailli par des femmes. Dans l’immense cour, c’est à peine qu’on repère une personne vêtue d’une blouse blanche.

Le personnel qualifié est presqu’inexistant. Il représente à peine 10 à 20% du nombre de pratiquants. «80 à 90% sont des aidessoignants », déclare Oumarou Bello, surveillant général de l’hôpital régional de Ngaoundéré. Ce qui constitue un véritable handicap pour cette formation hospitalière. Encore que ceci peut être considéré ici comme le moindre mal. Car le véritable problème qui paralyse cet établissement hospitalier, c’est l’absence de médecins spécialistes. «Nous n’avons pas assez de spécialistes. Et ceux qui sont présents sont reversés à Dang, comme enseignants à l’université», argumente Oumarou Bello. Selon lui, s’il y avait plusieurs spécialistes, les patients verraient leurs maux soulagés.

DÉCRÉPITUDE

Actuellement, à l’hôpital de Ngaoundéré, on ne retrouve pas toutes les spécialités. Notamment la santé mentale, la santé dentaire, la cardiologie, la pédiatrie, l’ophtalmologie, l’odontostomatologie, la radiologie, la kinésithérapie, la chirurgie, la pharmacie. Pis, les infectiologues, les cancérologues, les gastroentérologues, les ophtalmologues, les dermatologues, eux, sont inexistants dans cet hôpital.

«Si une personne qui souffre de vitiligo ou de leucémie vient pour se faire consulter chez nous, nous sommes obligés de la renvoyer dans un hôpital de catégorie un ou deux. Et nous faisons face à ce genre de situations tous les jours», explique Aissatou, aidesoignante à l’hôpital de Ngaoundéré. Sur les 11 spécialités qu’on retrouve dans cette institution hospitalière, il n’y a que 22 praticiens dont trois techniciens. En psychiatrie, ils sont trois médecins, idem en pharmacie. En santé dentaire, il y a un technicien et deux dentistes. En radiologie, c’est pareil.

En kinésithérapie, ils sont deux médecins. Tout comme, en cardiologie et en oto-rhino-laryngologie (ORL). Il n’y a pas de médecin spécialisé en ophtalmologie. «La personne qui consulte dans ce domaine précis est un technicien», apprend-on d’un aidesoignant. Il y a une pédiatre et deux gynécologues. Tout ce personnel travaille dans des bâtiments, et avec des équipements vétustes.

«Il y a longtemps que le plateau technique ne répond plus aux normes», ironise un médecin. Avec le programme chèque santé (permet aux femmes enceintes de débourser uniquement 6 000 Fcfa pour la prise en charge à partir des premières visites prénatales, pendant l'accouchement et jusqu'à ce que l'enfant ait 42 jours) et la récurrence des fistules obstétricales, le pavillon mères-enfants, le bloc opératoire, les services d’urgences, la réanimation, sont devenus étroits.

RÉFORMES

Parmi ses réformes, l’aspect financier est le plus important. Avant l’arrivée du Dr Mohamadou Hassimi, certains praticiens détournaient de l’argent pour les billets de session, tandis que des services comme la banque de sang avaient une gestion autonome. Le personnel d’appui et les stagiaires recevaient un franc symbolique pour assurer leur transport. «La situation est en train de changer, mais l’hôpital a besoin du personnel», regrette-t-on à l’hôpital. Classé en catégorie 3, l’hôpital régional n’a pas qualité de recruter le personnel médical. C’est à la Fonction publique que revient cette charge.

Seuls les hôpitaux du niveau un, comme l’hôpital central de Yaoundé, ont le pouvoir de recruter le personnel soignant. «Ce que nous pouvons faire à notre niveau, c’est d’utiliser à bon escient les 30% des recettes que nous retenons pour la gestion de l’hôpital», relève Oumarou Bello. En révélant que 70% des recettes générées par l’hôpital sont reversées au ministère des Finances.

D’après les derniers chiffres de l’hôpital, celui-ci a reçu 70.528 malades en 12 mois; soit 194 personnes par jour. Aussi, la construction de nouvelles unités serait-elle impérative. Avec l’arrivée de Mohamadou Hassimi, le nouveau directeur de l’hôpital, l’aboutissement de ce projet risque de s’inscrire dans un futur lointain, «à cause des nouvelles réformes qu’il cherche à mettre en place», croit savoir un proche.

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