Cameroun, Test obligatoire du VIH/Sida: MAMA FOUDA AU CŒUR D’UNE NOUVELLE CONTROVERSE
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Cameroun, Test Obligatoire Du Vih/Sida: Mama Fouda Au Cœur D’une Nouvelle Controverse :: Cameroon

Le ministre de la santé rend obligatoire le test du Vih/Sida pour toute personne en consultation dans un hôpital et suscite la désapprobation parmi les médecins et les experts en laboratoire. Une note d’information publiée le 22 Juin 2016 par le ministre de la santé André Mama Fouda rend obligatoire le test du VIH/SIDA pour toute personne en consultation dans une formation sanitaire du Cameroun. Une décision qui fait sursauter médecins ,pharmaciens et biologistes. A-t-on le droit d’imposer à qui que ce soit un test du ViH ? A-t-on seulement le droit d’imposer à un malade un acte médical qu’il ne souhaite pas ? Nous avons interrogé pour la rédaction de ce texte une dizaine de spécialistes camerounais installés en Belgique. La plupart expriment leur étonnement devant la note d’information du minsante. Un médecin du travail a eu des doutes sur la véracité de l’information parce qu’elle lui paraissait tout simplement contraire à la déontologie médicale et au droit. L’administration d’un acte médical doit respecter l’autonomie du sujet et son consentement. Il nous a été expliqué à cet effet que le seul vaccin obligatoire est celui de la poliomyélite. Un pays comme les Etats-unis qui a essayé de rendre obligatoire le test du SIDA pour toute personne qui voulait entrer sur le territoire américain a été très critiqué par l’OMS.

Un pharmacien biologiste très connu en Belgique dans les milieux du laboratoire estime que la note d’information du minsante n’est pas seulement critiquable, mais qu’elle peut aussi avoir des effets contraires à ce qu’elle recherche.

La note d’information du minsante exprime le besoin de se conformer aux grandes orientations internationales en matière de VIH notamment les nouvelles directives de l’OMS et l’objectif <<90-90-90>> de l’ONUSIDA.

Nous avons pris connaissance de la documentation de l’Onusida sur l’objectif<< 90-90-90>>.Il n’est dit nulle part dans le texte en question que le test du VIH peut être obligatoire. Tout au contraire le rapport de l’Onusida intitulé 90-90-90 Une cible ambitieuse de traitement pour aider à mettre fin à l’épidémie du Sida condamne toute mesure coercitive au nom du respect des droits humains. Le rapport de l’organisme international relève très clairement :

<<Les approches coercitives violent non seulement les normes fondamentales des droits de l’homme, mais elles entravent également l’espoir de mettre fin à l’épidémie du sida. Comme l’expérience à travers le monde l’a montré de manière répétitive et concluante, les approches coercitives éloignent les personnes des services dont elles ont vraiment besoin.>>.

Le ministre de la santé a-t-il lu ses lignes ? A-t-il lu les rapports des organismes internationaux sur lesquels il prétend s’appuyer ?

L’Onusida a totalement raison. Si les gens savent qu’en se rendant à l’hôpital il leur sera imposé un test du VIH alors qu’ils n’en veulent pas ils cesseront de se rendre dans les hôpitaux et vont s’en remettre aux guérisseurs traditionnels. Ce qui entraînera des conséquences plus que dommageables pour l’Etat général de la santé publique. On se retrouvera dans nos quartiers avec des milliers d’individus qui sont malades mais refusent de se rendre à l’hôpital parce qu’ils redoutent le test du VIH.

Tous les experts médecins, biologistes, pharmaciens camerounais de Belgique interrogés dans le cadre de cette enquête sont hostiles aux mesures coercitives et plaident pour la sensibilisation. Le Radiologue Régis Santou se demande comment on pourra imposer à un individu un test qu’il ne souhaite pas faire ? Arsenne Kamdem Cardiologue à Namur et membre de Medcambel essaye d’adopter dans cette polémique une position de synthèse. Bien qu’il refuse d’entrer en guerre contre la décision du ministre, il pense tout de même qu’il est plus préférable d’investir sur la pédagogie. Il pense aussi qu’il faut respecter la liberté d’un individu de refuser le test.

On peut faire le pari de la pédagogie et le gagner.il suffit de tenir sur le sida un discours positif et rassurant. Or la médecine et le monde associatif, les médias et les gouvernements continuent à entretenir sur cette maladie un discours catastrophiste fondé sur l’équation VIH=SIDA= MORT PROGRAMMEE.

Or nous savons aujourd’hui qui cette équation n’est plus tenable. Un traitement suivi rend le VIH indétectable dans le sang et les spermes. Les statistiques de l’Onusida sur ce sujet sont tout simplement impressionnants. On apprend en lisant le rapport de l’organisme international sur l’objectif <<90-90-90>> qu’à l’échelle d’un pays comme le Rwanda 83% des personnes recevant un traitement antirétroviral ont vu leur charge virale supprimée après 18 mois de traitement en 2008-2009.Le rapport cite par ailleurs l’étude Partner qui révèle que parmi 767 couples séro-discordants et après un nombre estimé de 40 000 cas de rapports sexuels, aucun cas de transmission du VIH n’est survenu lorsque le partenaire séropositif avait une charge virale indétectable. Un expert en laboratoire assez bien informé sur tout ce qui touche le Sida nous a expliqué qu’un malade qui suit correctement son traitement aura entre 6 mois et 1 et demi pour que le VIH ne soit plus détectable dans son sang. Ce qui signifie qu’il pourra désormais avoir des rapports sexuels non

protégés et faire des enfants. Toutefois explique le scientifique Camerounais, il faudra qu’il continue à prendre ses médicaments car le Sida peut cesser d’être détectable dans le sang et se cacher dans le cerveau par exemple.

Pourquoi ne pas admettre au regard de tous ces éléments d’information qu’un malade peut se débarrasser du VIH et dans le cas extrême qu’il peut guérir du Sida qu’on doit distinguer de la séropositivité ? Si la population intégrait l’idée que le sida est guérissable beaucoup de gens seraient mieux disposés à se soumettre à un test et à suivre un traitement. Au lieu d’emprunter ce chemin qui paraît plus lucide et plus réaliste on a investi sur le catastrophisme et la peur avec l’idée qu’il fallait effrayer la population pour susciter une prise de conscience.

Une autre question a été soulevée par la note d’information du minsante : Un test complet de VIH ne se fait pas dans toutes les unités de santé.Les tests rapides souvent faits en pleine rue par des associations n’ont aucune validité scientifique. Un test complet ne peut se faire que dans un centre agrée conformément à un protocole bien défini :

Les personnes voulant connaître leur statut sérologique subissent d’abord un test dit <<d’évaluation>> dont le plus courant est de type Elisa. Simple et d’un coût abordable,il est réputé posséder une excellente sensibilité,c'est-à-dire capable de détecter avec précision la présence d’anticorps chez des personnes infectées.

Si ce premier test est positif,un deuxième test du même type est pratiqué. S’il s’avère positif à son tour, on effectuera dans un troisième temps un test dit de<< confirmation>> généralement de type Western Blot possédant une forte spécificité c'est-à-dire capable de détecter avec précision l’absence d’anticorps chez les personnes non-infectées.

Combien de temps tout cela dure ? Dans les pays développés pour un test classique le délai d’obtention d’un résultat peut être d’une semaine. Le délai pour obtenir un résultat négatif fiable après l’exposition à un risque est de 6 semaines.

Tout ce qui a été dit dans les lignes qui précèdent restitue tout simplement l’articulation du processus de dépistage.

Les outils utilisés pour réaliser les tests suscitent encore la controverse sur leur fiabilité à l’intérieur même de la communauté scientifique. La médecine officielle et orthodoxe essaye souvent d’étouffer ce genre de controverses par conservatisme académique et dogmatisme idéologique.

Etienne de Harven docteur en médecine et professeur émérite d’anatomopathologie à l’université de Toronto au Canada restitue si bien le doute qui entoure ces tests. Il écrivait en substance dans un livre tonitruant intitulé les dix plus gros mensonges sur le Sida :

<<Il n’ y a aucune preuve que les protéines antigènes sélectionnés proviennent d’un virus appelé VIH. De plus le phénomène des réactions croisés ne permet pas d’affirmer que les anticorps qui réagissent sont spécifiques des antigènes présents dans le test-Enfin les études réalisées par les firmes fabricantes pour valider leurs tests ne sont pas scientifiquement acceptables-En effet pour prétendre annoncer la sensibilité d’un <<test VIH>>,on doit l’évaluer sur une population la plus importante possible d’individus dont on sait preuves à l’appui qu’ils sont porteurs du virus.Or Le VIH étant indétectables même chez les grands malades, ces preuves n’ont jamais pu être apportées>>

Nous autres commentateurs nous ne pouvons que suivre avec un étonnement amusé cette querelle de chapelles entre scientifiques.

Il est important d’insister une fois de plus sur la nécessité du consentement personnel dans les tests de VIH. Bousculé par la polémique le ministre André Mama Fouda a tenté un rétropédalage en expliquant que le test du VIH n’est pas obligatoire mais une recommandation. Ce jeu de mots ne sert qu’à camoufler une ruse institutionnelle. Ce qui se passera souvent c’est que beaucoup de malades seront amenés à céder sous la pression et l’intimidation d’un jeu de pouvoir. La résolution de se soumettre à un test de VIH doit être une démarche libre-Libre car découlant non d’une pression exercée par l’autorité médicale mais de la bonne information du citoyen. Une information qui rassure le malade à l’idée qu’il pourra retrouver une santé convenable. Ce qui est vrai au regard des connaissances disponibles à ce sujet. Car il est important qu’un individu soit préparé psychologiquement à recevoir l’annonce de sa séropositivité. En l’absence d’une telle préparation les perturbations psychologiques provoquées par l’annonce d’une séropositivité et les réactions émotionnelles qui en découlent induisent les réactions physiologiques dommageables pour la santé, en affaiblissant les réactions de défense naturelles de l’organisme.

Oui l’homme de la rue a raison de penser que cette maladie commence le jour où ou on est informé et en vient souvent à penser qu’il est peut-être préférable de ne pas le savoir. Le sentiment de l’homme de la rue correspond à une explication scientifique. Le professeur émérite d’anatomopathologie Etienne de Harven explique le lien entre le stress intense et le déclenchement de la maladie :

<< Dans la majorité des cas le stress psychologique débute avant le test de dépistage. En effet si l’on fait une démarche d’aller se faire tester c’est que l’on pense avoir eu une conduite à risque-Une fois connue sa séropositivité l’individu entretien souvent son stress soit en s’isolant volontairement, soit par le rejet de l’entourage. De nombreuses études menées depuis des années ont démontrées qu’un stress psychologique sévère induisait des symptômes semblables à ceux rencontrés dans le sida notamment la baisse du nombre de cellules T4>>

Que faire donc ? Est-ce qu’il préférable de ne pas le savoir ? Non nous pensons qu’il est préférable de le savoir. C’est pour cette raison que l’Etat et le corps médical doivent renoncer au catastrophisme en expliquant à la population que c’est une maladie comme une autre, qu’ elle peut disparaître suite un traitement suivi. Or on continue à expliquer aux gens que cette maladie ne se soigne pas. C’est une mauvaise piste, elle mène à l’impasse et compromet les efforts de l’Onusida pour faire reculer la pandémie.

Nous allons conclure par un détail qui fait couler encre et salive. Certains observateurs pensent que toute cette histoire crée par Mama Fouda n’est qu’une affaire d’argent. Le Budget de l’Onusida dans le cadre du projet<<90-90-90>> est étourdissant. Il est donc question de créer quelque chose et solliciter l’aide internationale.

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