Opération Epervier : La deuxième vie d’Yves Michel Fotso
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L’homme d’affaires a reçu une deuxième condamnation à perpétuité vendredi dernier au Tcs.

C’est à croire que tous étaient dans le secret des délibérations. La sentence n’a alors pas surpris la poignée de personne qui se trouvait dans la salle d’audience du Tribunal criminel spécial (Tcs) vendredi dernier un peu après 17h, lorsque le juge Francis Claude Moukouri a prononcé d’une voix monocorde la prison à vie à l’encontre d’Yves Michel Fotso. Suite à cela, le Tribunal a ordonné la confiscation des comptes logés à la Bicec, à Afriland first bank, à la Cbc, à Uba, pour ne citer que ces banques.

Ces comptes appartiennent pour la plupart aux sociétés dans lesquelles Yves Michel Fotso possède des intérêts économiques. Il s’agit de la Fotso group holding, de la Capital financial holding, de la Clean oil logistic et de la Clean oil recording. Reconnu coupable d’un détournement de 10, 057 milliards FCfa, l’accusé a été condamné a versé 20 milliards FCfa à la liquidation de la Camair, préjudice moral, préjudice économique et frais de justice confondus. A l’Etat du Cameroun, il devra payer la somme de 20 millions FCfa. C’est la deuxième peine à perpétuité que l’ancien directeur général de la Camair reçoit en l’espace de quatre jours. Cet autre verdict marquait la fin de l’instruction du volet 1 de l’affaire Camair après l’arrêt prononcé dans le volet 1. Dans ce dernier pan de l’affaire Camair, quatre griefs étaient reprochés à Yves Michel Fotso.

Sur le détournement de 8,934 milliards FCfa.

Il a été reproché à Yves Michel Fotso d’avoir distrait 8, 934 milliards FCfa en « mettant en berne » le contrat d’achat de deux aéronefs auprès de la société Bombardier. En effet, le 24 janvier 2001, la Camair dirigée par Yves Michel Fotso avait signé avec Bombardier un contrat pour l’achat de deux avions au prix de 56 milliards FCfa. D’après les termes de cet accord, la totalité de cette somme devait être payée en mai 2001 faute de quoi la Camair perdrait tout paiement préalable effectué dans le cadre de cette transaction. Le 31 janvier 2001, le compte de la Camair ouvert dans les livres de la Cbc a été débité de la somme de 8, 934 milliards FCfa au profit de Bombardier.

Ce déposit n’a toutefois pas été suivi d’un autre paiement. C’est ainsi que le 31 janvier 2002, sept mois après le délai contractuel convenu, Bombardier décide de confisquer la somme de 8,934 milliards FCfa sans que aucun n’avion n’ait été livré. « Il apparait que cet échec de la Camair dans l’acquisition de deux avions ne saurait s’analyser comme un moyen utilisé par l’accusé Yves Michel Fotso pour retenir ou obtenir les fonds de la Camair. Par ailleurs Bombardier n’a jamais contesté avoir reçu la somme de 8,9 milliards FCfa. Le détournement de deniers publics tel que avancé par l’accusation n’est donc pas constitué contre Fotso. S’agissant de ce chef d’accusation, il échet de l’en déclarer non coupable », tranche le juge. Yves Michel Fotso est acquitté sur cette première accusation.

Sur l’accusation de détournement de 4,053 milliards FCfa.

Il est reproché à Yves Michel Fotso d’avoir payé à la société Aircraft, dont il est présenté comme étant le promoteur, la somme de 4,053 milliards FCfa débitée du compte Camair logé à la Cbc. Cette somme est issue des indemnisations versées à la Camair par Chanas Assurances suite à l’accident du Boeing 747 Combi survenu à l’aéroport Roissy Charles De Gaulle à Paris. Lors de l’information judiciaire, Yves Michel Fotso avait expliqué que ce paiement versé à Aircraft constituait des honoraires accordés à cette société pour son intervention dans la procédure d’indemnisation de la Camair.

Lors de la phase de jugement au cours de laquelle l’accusé a renoncé à se présenter, le témoin de l’accusation, Emile Christian Bekolo, a déclaré n’avoir vu nulle part trace d’un quelconque contrat liant la Camair à Aircraft, encore moins la trace d’une facture de prestation de Aircraft. En outre, un représentant de Chanas a indiqué que l’indemnisation du Combi a été assurée sur la seule base de la note de couverture et ceci sans aucune intermédiation en vertu de la police d’assurance.

Ce qui fait dire au juge que « contrairement à ce qu’a soutenu l’accusé à l’information judiciaire, point n’était besoin de recourir à un quelconque intermédiaire ce d’autant plus que Chanas avait déjà informé la Camair que le règlement se ferait sur la base d’une perte totale. Il est aisé de déduire que le prétendu paiement d’honoraires à Aircraft est un artifice malicieusement ourdi par l’accusé pour l’unique but de distraire des caisses de la Camair la somme de 4, 053 milliards FCfa dont l’accusé a du reste demandé par la lettre adressée à la Cbc que le chèque correspondant lui soit personnellement remis. Il convient de le déclarer coupable du détournement de 4,053 milliards FCfa », décide la collégialité des juges sur cet autre point.

Sur l’accusation de détournement de 4,666 milliards FCfa

Dans le cadre de l’indemnisation du 747 combi, un avion appartenant à la Camair, suite à l’accident survenu à Paris, l’assureur a versé 29 milliards FCfa à la Camair en quatre acomptes. Ces paiements se sont effectués en dollars. Soient 10 millions de dollars en janvier 2001, 15 millions de dollars en février 2001, 1,5 millions de dollars en avril 2001 et 2,2 millions de dollars en juillet 2001. Sur instruction de Yves Michel Fotso, a soutenu l’accusation, ces paiement ont été libellés dans le compte de la Cbc logé à la Bnp Paris au lieu de les transférer dans le compte de la Camair logé à la Cbc Douala.

L’accusation martèle que par cette opération, l’accusé a permis à la Cbc de bénéficier des intérêts de l’ordre de 4,666 milliards FCfa que la Camair aurait du bénéficier. Devant le juge d’instruction, Yves Michel Fotso a justifié cette transaction comme étant une exigence de la Cbc qui à l’époque était la seule banque disposée à appuyer financièrement la Camair. Il a par ailleurs avancé avoir reçu des instructions du chef de l’Etat de ne pas faire tomber la Camair. « L’accusé n’a produit aucun document à l’appui de ces affirmations. Le stratagème a permis à la Cbc et dont à Yves Michel Fotso de profiter des intérêts générés par cette transaction. En distrayant ces fonds, Yves Michel Fotso s’est rendu coupable du crime de détournement de deniers publics », statue le juge.

Sur le détournement de 1, 4 milliards FCfa

Yves Michel Fotso est accusé d’avoir vendu l’épave du Boeing 747 Combi à une société de location d’avions à hauteur de 1,4 milliards FCfa sans toutefois reverser cette somme à la Camair. Pour asseoir cette accusation, le Tribunal s’appuie sur les correspondances ci-après : la lettre du 24 décembre 2002 de Yves Michel Fotso à Gia demandant au Dg de cette structure de faire un déposit supplémentaire de deux millions de dollars à Boeing (transaction effectuée dans le cadre de l’achat de l’avion présidentiel, Ndlr) provenant de l’argent que le Dg de Gia a reçu de la vente de l’épave du 747 Combi et une lettre du 27 août 2002, demandant à Yves Michel Fotso d’attester que le Boeing 747 Combi a été rayé des registres d’immatriculation, pour ne citer que celles-là.

« Il résulte preuve contre Yves Michel Fotso qu’en ne reversant pas les produits de la vente de l’épave du Boieng 747 Combi de la Camair, il a opéré un détournement de deniers publics. Il échet d’entrer en condamnation contre lui », a conclu le juge. « En se dérobant des débats, en refusant de s’expliquer sur les faits de l’accusation devant votre Tribunal devant lequel il a manqué de courtoisie et de déférence qui vous convient, M. Fotso vous a privé de tout argument qui aurait pu justifier que soit atténué par le biais des circonstances atténuantes la peine d’emprisonnement à vie. De  telle sorte qu’il ne vous reste plus qu’à prononcer cette dernière peine que nous requérons », a exhorté le parquet général du Tcs.

Une exhortation qu’a suivie Francis Claude Moukouri et les deux autres membres de sa collégialité en prononçant la peine à vie. Yves Michel Fotso est attendu ce jour à la Cour suprême dans le cadre du pourvoi qu’il a formé suite à sa condamnation à 25 ans de prison dans le cadre de l’affaire de l’avion présidentiel.

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