Burkina Faso : Trois leçons d’un scrutin historique
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Burkina Faso : Trois Leçons D’un Scrutin Historique

L’élection du 29 novembre clôt la transition démocratique issue du soulèvement populaire qui a renversé le président Blaise Compaoré en octobre 2014. Selon le journal Aujourd’hui au Faso, trois enseignements sont à retenir de ce vote.

Cinq millions et demi d’électeurs, c’est le corps électoral burkinabè qui s’est rendu, le 29 novembre, aux urnes pour élire le président du Faso et 127 députés.

La présente compétition électorale se veut singulière, historique et inédite, car elle se tient sans celui-là même qui avait instauré un semblant d’Etat de droit, une démocratie trompe-l’œil, mais qui n’en demeurait pas moins un Leviathan : Blaise Compaoré, déboulonné du pouvoir le 31 octobre 2014 par une insurrection. Les élections sous Blaise se suivaient et se ressemblaient, car lui seul gagnait et perpétuait un système qui avait quasiment privatisé l’Etat.

Trois aspects fondamentaux font que cette élection est d’une historialité inégalée pour les Burkinabés :

  • La participation

Primo : la masse silencieuse, cette grande muette, qui ne votait jamais, blasée par les mœurs politiques nauséabondes, s’est amoindrie. Au regard du corps électoral consistant, de l’engouement devant les bureaux de vote, en dépit du fait que certains peinaient à retrouver leur nom sur la liste et d’autres desiderata imputables à la Céni [commission électorale nationale indépendante], on peut affirmer que le Burkina postinsurrection s’éloigne de plus en plus de la sphère abstentionniste.

Les insurgés de fin octobre avaient une seule obsession : faire partir Blaise, déconstruire son système et instaurer un nouveau contrat social, d’où seront bannis les mauvais usages instaurés par le régime déchu.

Jeunes des grins [lieux populaires de rencontre] de thé, intellectuels, gens du secteur informel [qui exercent des activités non déclarées], tous étaient peu ou prou des abstentionnistes indécrottables, mais ils sont vraisemblablement allés accomplir leur acte citoyen.

Ces “refusards” ont compris qu’en se portant aux abonnés absents à une élection, aussi ouverte et serrée, ils ne pourront pas porter de jugement après, sur des programmes qu’ils n’ont pas choisis ou rejetés par les urnes.  

  • La compétition

Secondo : c’est une élection ouverte où le quotient indétermination est très élevé, aussi bien pour la présidentielle que pour les législatives. En ce qui concerne la présidentielle, la fournée de prétendants au fauteuil du palais Kosyam est en surnombre : 14 pour 17 millions d’âmes. Mais c’est justement là aussi l’un des traits de la démocratie, qui permet à celui qui se sent pousser des velléités de destin national de pouvoir l’exprimer, même si, évidemment, se côtoient dans ce lot favoris, tocards et saltimbanques.

Parmi cette dizaine de candidats, le duel au sommet est dominé par Roch-Marc Kaboré et Zéphirin Diabré, les deux pachydermes du marigot burkinabé. Malgré les sondages, que l’un ou l’autre de ces deux gagne, ils ne s’en trouveront pas beaucoup qui crieront au scandale et au hold-up électoral. Des tentatives de fraudes et même des fraudes, il y en a eu sans doute, mais qu’elles puissent impacter les résultats définitifs, on doit en douter.  

  • La fin du pouvoir kaki

Tertio : l’avènement d’un second civil au pouvoir. Ce sera la première fois que le peuple burkinabé se choisira un président civil, car, depuis 1960, excepté le cas du premier président, Maurice Yaméogo, le pouvoir kaki, pour ne pas dire des prétoriens, a envahi l’arène politique et ne voulait plus en sortir.

En vérité, on peut même parler d’eschatologie, la fin des temps pour la saga Compaoré. Car page après page, depuis fin octobre, les Burkinabés ont feuilleté le livre des vingt-sept ans de règne de celui qui marqua le Burkina Faso au fer rouge. Le présent scrutin marque les premières lignes de l’épilogue, car tant qu’il n’y aura pas la justice et la réconciliation, rien ne sera définitivement fermé pour cette période.
 
Le changement donc ! ”Changement”, un vocable qui a traversé tous les discours des candidats lors de la campagne électorale. A la limite, il s’agira d’une révolution copernicienne, qui ne se fera qu’avec tous les Burkinabés, cornaqués par un pouvoir voulu, accepté et compétent.

Scrutin exutoire, scrutin exorciste donc, que celui de ce 29 novembre, au pays des hommes intègres !

© aujourd8.net : Zowenmanogo ZOUNGRANA

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