Conflit : Les tchadiens confisquent le Logone
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Les autorités de ce pays ont décrété l’interdiction de « toute activité humaine » sur le fleuve transfrontalier et n’hésitent pas à faire subir leur loi au Cameroun. Des populations subissent quotidiennement leurs brimades.

Les habitants de la plaine du Logone s’apprêtent au grand moment de l’année. La semaine prochaine, comme depuis des centaines d’années, la saison de la grande pêche va ouvrir. Des milliers de familles des départements du Mayo Danay et du Logone et Chari s’y préparent depuis des mois Camer.be. Traditionnellement dès le mois d’octobre à la faveur des décrues de la plaine, le poisson migre et suit les eaux qui vont se jeter dans le Logone. Ces familles de pêcheurs partent alors de leurs résidences habituelles pour s’installer dans des campements le long du Logone, Lorme Mazra et Logomatya. Si ces deux derniers cours d’eaux coulent à l’intérieur du Cameroun, il n’en est pas de même pour le Logone. Il sert de frontière au Tchad et au Cameroun.

Une tradition séculaire

Cette année, plus qu’avant, les pêcheurs appréhendent beaucoup ce moment où pourtant elles ont l’habitude de prospérer. En cause, l’interdiction de « toute activité humaine sur le fleuve Logone » que les autorités de Ndjamena ont décrétée au mois d’avril. C’était juste après les attentats kamikazes des terroristes de Boko haram qui ont endeuillé la capitale tchadienne.

Les officiels camerounais d’accord

La mesure accueillie comme opportune par les officiels camerounais, allait très vite montrer des dérives dans son implémentation. « C’est suite au attentats kamikazes de Ndjamena que nos frères tchadiens ont pris ces mesures salutaires. On ne maîtrisait plus le Logone. Les Boko haram transportaient leur matériel de mort à la barbe de ces populations. On s’étonne que ces choses se soient passées le long du Logone Camer.be. La mesure des Tchadiens est pour notre intérêt à tous », justifie une autorité proche du dossier qui ne souhaite pas être reconnue. Le responsable camerounais évoque les nombreuses caches d’armes démantelées le long du fleuve.

N’empêche, les dérives observées dans l’application de cette mesure tchadienne sont nombreuses. A la fin du mois de septembre dernier, Boubakari Abba, le chef du centre zootechnique de Tané, dans l’arrondissement de Goulfey a été arrêté dans son domicile par des militaires tchadiens. Ses persécuteurs l’ont ensuite amené manu militari au Tchad. Ils soupçonnaient le fonctionnaire camerounais d’être un complice de Boko haram. L’indice qui a déclenché cet enlèvement est que leur captif avait réuni deux religieux pour faire des prières pour son épouse qui allait bientôt accoucher Ca mer .be. Boubakari Abba et les deux marabouts ont été gardés pendant deux semaines au Tchad. Il a fallu des pressions diplomatiques pour que les trois hommes recouvrent leur liberté. Mais, ce n’était que le dernier incident d’une interminable liste.

Il y a eu cet échange de coups de feu entre le chef de canton de Hinalé avec des militaires tchadiens qui voulaient s’accaparer la marchandise d’un vendeur de sucre. L’altercation a entraîné le décès du notable camerounais qui, suffoqué d’indignation, a succombé à un accident cardiaque. Il y a aussi ces Camerounais, qui pour se rendre dans leurs villages plus loin sur la rive camerounaise du Logone doivent faire un détour au Tchad pour se payer une autorisation de naviguer sur le fleuve. Il y a même eu des canards sur qui des militaires tchadiens ont tiré à la mitrailleuse parce qu’ils barbotaient dans le fleuve.

Puis gênées...

Les officiels tchadiens de fait ne reconnaissent aucune autorité à leurs homologues de la rive gauche du Logone. Des patrouilles lourdement armées se font à Kousséri derrière la résidence du préfet. Les piroguiers qui s’y aventurent sont arraisonnés à la mitrailleuse. Des scènes violentes ont pu être observées à cet endroit-là des jardins du Relais Logone. Les tchadiens sont surarmés et omniprésents sur le Logone Camer.be. La poignée d’élément du poste de police d’Arenaba dans l’arrondissement de Zina, armés de pistolets est dérisoire. Les tchadiens qui semble avoir mieux conscience de la préciosité de l’eau dans le sahel, se sont accaparés le Logone.

L’Ong Association camerounaise  pour l’éducation environnementale (Aceen), de réputation continentale, a fait une étude réputée sur la pêche sur le Logone. Selon elle, l’activité rapporte annuellement plus d'un milliard de F.Cfa à l'économie locale et fait nourrir plusieurs centaines de milliers de personnes à travers la région de l'Extrême-Nord.  

Impuissantes…

Les populations camerounaises ruminent les humiliations que leur infligent délibérément les Tchadiens sous le regard impuissant des autorités locales. Conciliants, des pêcheurs se sont constitués en délégations pour négocier avec leurs tourmenteurs l’autorisation de pêcher. Ils ont beau brandir le document que délivre encore le démembrement local du ministère de l’Elevage, des Pêches et Industries animales, les militaires tchadiens n’y jettent même pas un regard. Seul le permis de pêche tchadien est valide. Les Tchadiens, embusqués sur le fleuve tirent sur tout ce qui bouge sans discernement et sans sommation. « Les Tchadiens ont toujours cru que le Logone leur appartient », regrette notre source auprès de l’administration territoriale. Ces problèmes ont été posés à la commission mixte Ndjamena Kousséri Camer.be. Nous sommes en pourparlers. Les discussions sont enclenchées, nous espérons que dans un avenir proche la situation sera normalisée », confie-t-elle gênée. Des mesures sont annoncées.

Telles ces patrouilles mixtes Tchad-Cameroun sur le Logone que notre source officielle susurre dans un souffle à peine audible. La doxa gouvernementale est lancée. Ça ne dure pas pourtant. Après un flottement, le fonctionnaire trahit le fond de la pensée des officiels. « Le Cameroun ne veut pas créer un autre foyer de tension ». « Le Cameroun ne s’était pas préparé à faire la guerre, nous sommes un pays de paix ».Un observateur relève plutôt la négligence des autorités de Yaoundé. Leur impuissance à faire respecter les conventions qu’elles ont ratifiées Ca mer .be. Pour le cas du Logone qui est un fleuve transfrontalier, sa gestion doit relever de la chartre de l’eau du bassin du lac Tchad. Ratifiée par les 2/3 des pays de la commission du bassin du lac éponyme, cette convention est en vigueur. Elle a été signée le 30 avril 2012 par les chefs d’Etat de la ladite commission. Ont paraphé le document, Idriss Deby président du Tchad, Goodluçk Jonathan président du Nigeria, Mohamadou Issoufou président du Niger, François Bozizé président de la République centrafricaine, Yaouba Abdoulaye, ministre délégué  auprès du ministre de l’Economie du plan et de l’Aménagement du territoire du Cameroun…

© Le Jour : Aziz Salatou

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