Les dessous du choix de Bolloré au port de Kribi
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Comment le Groupement Bolloré/CMA CGM/CHEC, qui présentait pourtant la meilleure offre technique et financière, a failli être écarté au bénéfice de l’entreprise philippine ICTSI.

Le suspense n’en était plus un en réalité. Quelques sources proches du dossier savaient que le choix du président de la République pour la concession du terminal à conteneurs du port en eau profonde de Kribi était fait, et ne se retenait pas de souffler le nom que le Premier ministre a rendu public dans un communiqué signé avant-hier, 26 août 2015. « Le Groupement Bolloré/CMA CGM/CHEC (...) est déclaré adjudicataire du contrat de partenariat pour l’exploitation et le développement du terminal à conteneurs du port en eau profonde de Kribi », écrit Philemon Yang, qu’on n’a pas l’habitude de voir signer lui-même des communiqués. D’après les indications du Premier ministre, le président du Comité de pilotage du Complexe industrialo-portuaire de Kribi, Louis Paul Motaze, a dès ce matin dix jours pour notifier le Groupement vainqueur de la concession et lui indiquer les « modalités pratiques relatives à la négociation des termes du contrat de partenariat. » Ainsi, se clôt un très long et tumultueux épisode du choix du partenaire de l’Etat dans ce segment d’activités du port de Kribi. Et le vainqueur à l’arrivée aurait pu ne pas être le meilleur candidat.

En effet, quand le président du Comité de pilotage du port de Kribi lance un nouvel appel d’offres, en fin janvier 2014, pour la désignation du concessionnaire du terminal à conteneurs du port de Kribi, deux semaines après l’annulation du précédent où Bolloré était sorti vainqueur sans concurrent, ce sont onze entreprises qui se bousculent. Les plus connues sont le groupement Bolloré/CMA CGM/CHEC, APMT BV et Necotrans. Le seul inconnu au bataillon est l’entreprise philippine ICTSI INC., qui va pourtant jouer un rôle important par la suite. Pour étudier les offres, une commission spéciale est créée au sein des services du Premier ministre, sous la présidence de Cyrus Ngo’o, Conseiller à la primature. La présélection désigne sans surprise Bolloré/CMA CGM/CHEC et APMT BV, mais aussi, contre toute attente, ICTSI INC.

La dernièreligne droite est un sprint que Bolloré connaît bien. Tout comme sa longue fréquentation de l’environnement portuaire national l’a aguerri sur les éventuelles exigences. C’est pour cette raison qu’il domine ses concurrents dans les offres financières présentées. www.237online.com Le Groupement Bolloré/CMA CGM/CHEC propose 623 millions d’euros, ICTSI, 467 millions d’euros et APMT BV 403 millions d’euros.

Le dossier technique est tout aussi costaud : Bolloré s’est associé à CMA-CGM, qui assure 45% du trafic conteneurisé en Afrique. En réalité, se couper de cet armateur dans le trio de tête dans le monde, c’est renoncer à près de la moitié du transport par conteneurs. Mieux, Bolloré complète son groupement avec CHEC, qui n’est autre que l’entreprise chinoise qui a construit le port général, et qui a aidé le gouvernement à trouver les 400 milliards nécessaires pour démarrer la phase 2.

Devant cette évidence, la Commission spéciale de passation de marché fait un choix curieux au moment de rendre sa copie. Elle choisit d’écarter le Groupement Bolloré et de remonter les dossiers de l’entreprise philippine ICTSI inc., et de la société hollandaise APMT BV. Le président du Comité de pilotage du port de Kribi et Secrétaire général des services du Premier ministre est contourné dans le dossier, qui atterrit directement sur la table de Philemon Yang. L’idée est que le chef de l’Etat aurait dit « qu’il ne faut pas mettre tous ses œufs dans un même panier. » Seulement, DIT (Douala international terminal), qui gère la concession du terminal à conteneurs au port de Douala, est partagée équitablement entre Bolloré Africa Logistics et APMT BV, à 40% chacun. L’actuel directeur général de Douala international terminal, Jakob Sidemius, est issu de cette entreprise.

A la vérité, même si les témoignages souhaitent rester anonymes, ICTSI inc. a manœuvré à la camerounaise, se faisant conseiller par quelques lobbyistes locaux qui ont su à quelle porte frapper. Visiblement, ils se sont arrêtés devant le bureau de Paul Biya, qui a décidé, il y a environ deux semaines, de confier la gestion du terminal à conteneurs du port de Kribi au Groupement Bolloré/CMA CGM/CHEC.

© LE QUOTIDIEN DE L’ECONOMIE : PARFAIT N. SIKI

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