Les lecteurs occasionnels de la Bible se rappellent de quelle façon magistrale le roi Salomon a démêlé une affaire extrêmement complexe mettant en conflit deux mamans qui revendiquaient la maternité d’un nourrisson. C’était parole contre parole. La plus aimante a eu gain de cause. Ce modèle de justice, tous les hommes en rêvent. Du moins tous ceux qui sont attraits devant les tribunaux pour une raison ou une autre.

Malheureusement, en rêver ne suffit pas pour en être exempté ni pour éviter son courroux. La Justice est une vertu ambivalente. D’un côté on la pare des qualités des autres vertus : prudence, équité, tempérance. On la veut dans ce cas indépendante et au-dessus des contingences. De l’autre, on la redoute parce qu’elle est le plus souvent négligente quand elle n’est pas manipulée, soit par ceux qui détiennent le pouvoir de nommer les juges, soit par tous les  justiciables fortunés qui les corrompent.

Avez-vous remarqué combien les grands de ce pays s’expriment lorsque l’oiseau justicier a jeté son dévolu sur eux comme il le fait sur les poussins qui s’aventurent hors des ailes protectrices de leur mère ? « J’ai foi en la Justice de mon pays ». Traduction en langage ordinaire accessible au commun des citoyens : « Je ne suis pas sûr de m’en tirer mais j’espère que les juges seront indulgents à mon endroit ». Peu s’en tirent en fin de compte même si leur culpabilité dans l’affaire qui les amène devant le tribunal n’est pas avérée. « Emprisonne tes ministres et tes directeurs généraux, spécialement ceux qui appartiennent au parti. Si tu ne sais pas pourquoi, eux le savent ».

Telle semble être la nouvelle loi du Talion au Cameroun. S’ils ne sont pas coupables de ce pourquoi on les a emprisonnés, ils doivent forcément être coupables de quelque chose. Il faut donc qu’ils payent. Et s’il s’avère qu’ils ne sont pas directement coupables, ils ont certainement aidé quelque complice à porter préjudice à l’Etat ou à d’autres citoyens. Le premier d’entre nous, seul véritable élu d’envergure nationale, veille au grain à sa façon. On doit lui reconnaître un certain talent : celui de faire le ménage dans son écurie (d’Augias ?).

En effet, le parti des flammes est un parti anthropophage. Il bouffe ses propres enfants. On dirait même plus. Il ne bouffe que ses propres gosses. Ne me demandez pas pourquoi. La réponse est trop évidente. Parce que ses enfants sont mal élevés. C’est probablement le seul parti au monde qui attire les malhonnêtes et les corrompus comme la viande faisandée attire les mouches. Sinon, comment expliquer autrement qu’ils soient si nombreux à croupir en prison et tout aussi nombreux à se bousculer au portillon du TCS ? Qu’ils ne soient pas coupables n’est finalement pas important. Pourquoi leurs camarades du Comité Central, du Bureau Politique, des sections, sous-sections et autres démembrements leur en veulent- ils au point de vouloir recréer dans les prisons de Yaoundé et  de Douala un parti et un gouvernement bis ? Vous avez remarqué comme moi que, même condamnés et déchus de leurs droits, ils continuent à être membres du même parti, occupant les mêmes postes.

Nous avons dit que notre Justice était négligente. Trop de citoyens coupables de larcins et de délits relevant d’une simple amende ou d’un sursis encombrent inutilement les prisons de la République. Les tribunaux sont remplis d’affaires dont le traitement ne nécessite pas forcément un quelconque renvoi et qui, par négligence, maintiennent des hommes et des femmes, des jeunes et des vieux, dans les liens d’une justice qui ne sait plus ou donner de la tête. Vidons les prisons de nos petits et primo délinquants pour faire de la place à nos braves militants du parti en flammes qui ont besoin de se refaire une santé aux frais de la princesse.