Guerre contre Boko Haram : Paris à tout prix ?
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Alors que germe l’idée d’un nouveau sommet y consacrée, des interrogations fusent sur son contenu et le choix de la capitale française.

Le président français, François Hollande, aurait difficilement pu choisir meilleure tribune que celle que lui a offerte mardi dernier « la semaine des ambassadeurs », pour suggérer dans son adresse aux diplomates français, l’idée de l’organisation d’un nouveau sommet de Paris dédiée à la guerre contre Boko Haram. C’est que la seule évocation de cet évènement – devant la presse mondiale – suscite autant espoirs, qu’interrogations.

La moindre étant : pourquoi Paris et pas ailleurs ? Dans le microcosme politico-diplomatique de Yaoundé, l’on pense que le choix de la capitale hexagonale est tout sauf fortuit. « Une conférence internationale qui se tient à Paris pour coordonner la lutte contre Boko Haram n’a pas le même écho que si elle se tenait à Yaoundé ou à Abuja, ou encore dans un autre Etat membre de la Commission du bassin du lac Tchad (Cblt) », soutient un officiel français.

Soit. « Mais un écho pour qui ? », s’interroge le politologue Mathias Eric Owona Nguini. Selon cet universitaire, « en proposant la tenue d’un nouveau sommet de Paris dédiée à la guerre contre Boko Haram, la France veut tout simplement rester au centre du jeu et conserver la paternité de l’initiative dans la gestion de ce dossier. De plus, ce qu’on peut faire à Paris, on peut aussi le faire à Yaoundé ou à Abuja », avance t-il. Un avis contesté par l’expert en questions de sécurité et de défense Raoul Sumo Tayo. Pour ce dernier, « il est clair que sans la première conférence de Paris, les lignes n’auraient pas bougé. Car il existe un contentieux entre le Nigeria et les pays africains francophones. On voit bien malgré tout aujourd’hui, que l’engagement des Etats sur ce dossier est inégal, ce qui nécessite un aplanissement des divergences et des égoïsmes nationaux. Et la France est bien placée pour jouer ce rôle de facilitateur », explique Sumo Tayo.

Financement

Par-delà ces réflexions, émergent également des interrogations sur le contenu d’un éventuel sommet à Paris, tant il est vrai que cette rencontre se tiendrait dans un contexte différent que celui du 17 mai 2014. Les données du problème ayant quelque peu changé. La situation sécuritaire a en effet évolué. Le mode opératoire de l’ennemi a changé (au Cameroun, au Tchad et au Niger), tout comme son nom (Etat islamique en Afrique de l’Ouest), et le problème  financement de cette guerre se pose avec une plus grande acuité. Sur ce dernier point, le rôle de Paris n’est-il pas primordial ? Au-delà de la conférence de donateurs évoquée par le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, lors de son passage à Yaoundé en février dernier, l’Hexagone pourrait user de son statut de membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, pour œuvrer à l’avènement d’une résolution onusienne dans ce sens.

Cette dernière idée n’est pas inédite, puisqu’elle a été longtemps serinée. D’après une source française, « seule une demande expresse des pays africains peut déclencher ce processus. Il nous est revenu que les Britanniques n’ont pas pu honorer leur promesse de débloquer sept millions de livres Sterling parce que ne sachant pas dans quel compte verser les fonds ». Doit-on en conclure que les pays africains auraient une attitude paradoxale en souhaitant un effort de guerre international mais en trainant dans le même temps les pieds pour aller le quérir ? L’idée que les mécanismes de financement de la guerre contre Boko Haram soit un des points (probables) inscrits à l’ordre du jour d’une nouvelle conférence de Paris y consacrée,  n’est en tout cas pas anodine.

© Mutations : Yanick Yemga

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