Visite de François Hollande en nocturne : Un « hibou » au palais d’Etoudi !
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Selon le programme annoncé, le président français arrivera à Yaoundé vendredi prochain à la tombée de la nuit pour une escale diplomatique dans la pénombre, pour repartir dans l’obscurité. Apparemment circonscrite au strict périmètre du palais de l’Unité et de la résidence de France, cette visite est loin d’être celle de tous les Camerounais. Plein flou sur une visite ténébreuse au propre comme au figuré, qui paraît aussi vraie « que la nuit, tous les chats sont gris » !

Au regard de l’agenda de François Hollande tel que publié sur le site officiel de l’Elysée, le périple du président français en Afrique, commencera dès le mercredi 01 juillet 2015, après son Conseil de ministres. Il se rendra tour à tour  à Cotonou, à Luanda, pour des visites bien pleines avant de finir par un crochet à Yaoundé pour ce que certains ont qualifié de «pause-café ». Question  d’apprécier à leur manière cette curieuse visite que même les sourires théâtraux que recommande la diplomatie ne sauraient lui donner une substance. Cela est d’autant plus significatif que selon le calendrier de l’Elysée aucun rendez-vous qui pouvait amener le chef d’Etat à regagner la France de toute urgence n’est signalé.

Du coup, ce constat ne cesse de fertiliser les commentaires qui vont dans tous les sens, en ce  moment précis où les Camerounais, comme  beaucoup d’autres observateurs avertis, avaient déjà fait la remarque selon laquelle depuis 2001, les présidents français, pourtant coutumiers des visites en Afrique et même dans la sous-région Afrique centrale, avaient systématiquement choisi d’éviter  le Cameroun. Il s’agit là d’une attitude qu’ils ont aussitôt rangée dans le cadre d’un cinglant désaveu du maître vis-à-vis de son élève, pendant que du côté du Cameroun, le sentiment anti-français était devenu la chose la mieux partagée. En somme, somme un divorce. L’humiliation de l’Ambassadrice de France au Cameroun par la foule lors de la célèbre marche du 28 février dernier en est une illustration qui a donné l’occasion à la France de subir en direct ce que certains considéraient jusque-là comme de l’affabulation.

Toutes choses qui ont alimenté certaines rumeurs selon lesquelles la venue de Hollande au Cameroun n’est rien de plus qu’une occasion pour les deux pays  de revoir leurs relations à l’heure où les Asiatiques brûlent d’envie de s’ériger en nouveaux maîtres sur un terrain qui autrefois étaient la chasse gardée des Gaulois. Même si pour certains oiseaux de mauvais augures, cette  visite sera  un test en or pour notre hôte qui lui permettra de réaliser par lui-même que la France est mal venue au Cameroun

Sur cette lancée, les tenants de cet humour noir vont  au-delà de l’atmosphère qui règne en ce moment , pour faire allusion  à des anecdotes qui ont entouré  les derniers voyages de ses prédécesseurs et démontrer que même la providence avait déjà joué sa partition pour caricaturer cette hostilité au grand jour. Ils se souviennent encore de ce charter  qui  avait été victime d’un accident monstre causant la mort à beaucoup de Camerounais partis de leur Sud natal pour venir acclamer Mitterrand lors de sa visite à Yaoundé dans les années 80. Plus tard, c’est  la visite officielle de Jacques Chirac  au Cameroun lors d’un sommet qui avait été écourté en juillet 1999 par la mort du roi Hassan II du Maroc. Alors qu’il était revenu une seconde fois à Yaoundé lors du sommet France-Afrique organisé par le Cameroun en janvier 2001, Chirac avait bien voulu se racheter. Mais la mort de Laurent-Désiré Kabila, alors président du Congo démocratique, était encore venue se mêler à son séjour pour pourrir l’atmosphère. Bilan: deux visites au Cameroun, deux décès de dirigeants africains. Une véritable poisse pour la destination Cameroun pour un président français. Et depuis, plus rien. Même les opérations de charme, à travers des communicateurs chèrement payées par Biya ne réussiront  à séduire ni Sarkozy ni Hollande.

Il a fallu du temps… pour revenir en nocturne, tel un hibou… 14 ans après

A la belle époque, la venue d’un président français au Cameroun était considérée par les thuriféraires régime comme une victoire diplomatique du « Renouveau » et de celui qui l’incarne sans oublier sa charmante épouse. Cela donnait lieu à une mobilisation tous azimuts, avec l’implication remarquable  des Camerounais à quelque niveau que ce soit. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui où le passage-éclair de François Hollande à Yaoundé présente aux yeux des Camerounais des allures d’un non-événement. Ils ont plutôt l’impression qu’il était juste question de remplir les formalités d’une visite, quelle que soit sa durée et de laisser libre-cours aux interprétations, ou encore pour plaisir à Paul Biya et à ses créatures.

L’événement tant attendu depuis des années n’était donc qu’un simple transit de quelques heures ? En réalité, le fait de l’avoir effectuée dans les ténèbres fait penser à tout ce qui est obscur, qu’on reconnaît généralement aux princes de la nuit. Par ailleurs, les plus vicieux estiment que si l’homme fort de l’Elysée a choisi la nuit,  c’est justement parce qu’il ne voulait pas subir le sort qui a été réservé à son ambassadeur le 28 mai dernier au boulevard du 20 mai à Yaoundé, en se faisant hué le long du trajet. Comme quoi, à 23 heures on est sûr  que la route sera moins bondée de monde qu’en journée. Et il pourra alors passer in cognito, à la faveur de l’obscurité.

A l’analyse, la curiosité de la présence de Hollande à Yaoundé ne réside pas seulement dans la durée de son séjour ou de l’entretien avec son homologue camerounais, puisqu’il aurait certainement appris  que Biya  tient ses conseils de ministre en 15 minutes ; il est plutôt  question de ne pas tomber dans la naïveté d’une simple visite de courtoisie quand on sait que des dossiers brûlants, d’une sensibilité avérée, méritent des concertations stratégiques pour l’avenir des deux pays en mal de nouveaux repères. Sachant sans doute que la nuit, la politique ne change pas de visage mais d’expression,  Hollande, tel un hibou, a justement choisi ce moment propice ( ?)  pour faire passer l’amère pillule.

A toute fin utile, on nous apprend que le hibou est un oiseau rapace nocturne, carnivore, au bec crochu et possédant des serres, que son mode de vie a été très souvent vecteur de nombreuses superstitions  toujours très liées au domaine du surnaturel, de la magie et de la spiritualité . On dit de lui qu’il peut voir la nuit  même avec une lumière très faible. En tout cas, qu’il voit cent fois mieux que l'homme. Les mêmes sources révèlent que les hiboux peuvent tourner complètement leur tête et à 360°.  C’est pourquoi pour certains, il symboliserait l'intelligence et la réflexion parce qu’ils ont les yeux de face pour mieux viser et peuvent repérer une souris à trois cents mètres. Moralité : si Paul Biya s’amusent à somnoler pendant les négociations, Hollande restera éveillé et plus que jamais lucides, et sera tant mieux pour la France et tant pis pour le Cameroun.

Espérons que le Nnom Ngii, qui n’a  jamais appris à ne pas redouter ce qui se cache dans les ténèbres saura lui prouver à son jeune homologue qu’avant lui, il a vu passer Mitterrand, Chirac, Sarkhozy, et peut bientôt Hollande lui-même. Comme pour dire que l’homme-lion saura être attentif pour montrer que par rapport au simple hibou, il a un plus.

© Ouest Littoral : PONUS

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