La criminalité faunique se porte bien au Cameroun
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La criminalité faunique se porte bien au Cameroun :: CAMEROON

Le spectacle se passe de tout commentaire. Une éléphante portant un éléphanteau abattu par des braconniers sans foi. A côté des chasseurs traditionnels, des groupes rebelles, certaines autorités administratives sont les facilitateurs du commerce illégal des espèces protégées. Constat du Fonds mondial pour la nature.

Le Cameroun fait partie de la forêt tropicale du bassin du Congo qui est un vaste massif forestier de 120 millions d'hectares. Plus de 19 millions d'hectares de la forêt camerounaise abritent une faune et une flore impressionnante. La faune du pays est sans aucun doute l'une des plus variées en Afrique avec 48 % des mammifères (297 espèces de mammifères avec 8 espèces endémiques), 54% d’espèces d'oiseaux (927 espèces d'oiseaux dont 24 espèces de répartition restreinte). Des espèces en voie de disparition.

10.343 Kg de viande saisis dans la seule ville de Yaoundé.

Le Fonds mondial pour la nature, Wwf, relève que 22.000 Kg de viande de brousse, toute espèce confondue ont été saisis dans les marchés de

Yaoundé en 2014. Le gros du trafic se passe sur le marché noir. Et en deux mois, 10.343 Kg de viande de brousse ont été découverts, seulement dans la ville de Yaoundé.

Parmi les espèces concernées, l’éléphant occupe une place de choix. La cause, ses ivoires. On se souvient des 29 pointes (169 Kg) saisis à Mambe en octobre 2013, lors d’un contrôle de routine. On n’oublie pas le massacre de 128 éléphants dans le parc national de Bouba N’djida en 2012. «Les populations d’éléphants de forêt ont diminué de deux tiers, 62% de 2002-2012 à cause de l’abattage pour leurs ivoires. Plus de 170 tonnes d’ivoire ont été saisies dans le monde entre 2009 et juin 2014, et les pays du Bassin du Congo sont les pays sources», confie le coordonnateur de la Mise en application de la loi au Wwf, Alain Bernard Ononino. Qui s’exprimait ainsi pendant la réunion de sensibilisation des médias sur la criminalité faunique et le commerce de la viande de brousse, mardi 31 mars 2015 à Douala.

Des complicités au-delà des frontières du Cameroun.

Dans son exposé sur l’ampleur du braconnage et de la criminalité faunique au Cameroun, Alain Ononino souligne que l’Asie de l’Est et du Sud sont les plus grands demandeurs. «La Chine est le principal demandeur de l’ivoire d’éléphant. Ils l’utilisent pour ses présumées

vertus aphrodisiaques, sa poudre médicinale… » Les acteurs de la fraude sont bien connus. Les chasseurs traditionnels (qui savent manier les instruments de chasse), les chasseurs à l’arme lourde (qui vont à pied ou à cheval), les grands groupes rebelles, des éléments de force de défense. Des personnalités de l’administration sont aussi impliquées. «Les autorités administratives ont la responsabilité en premier de veiller à l’application de la loi, et pour le cas, à l’application de la loi sur la protection du patrimoine faunique camerounais. Les autres partenaires ne peuvent apporter qu’un appui. Maintenant, on se rend compte que certaines autorités administratives s’impliquent de plus en plus dans le trafic illégal de la faune. Ce qui traduit l’ampleur de l’alarme qu’il faut sonner», dixit l’orateur.

«On ne peut omettre la forte implication de certains éco-gardes qui d’abord sont mal payés, environ 50.000 Fcfa. Ils sont flattés par le prix local du kilogramme d’ivoire qui oscille entre 100 et 150 milles Fcfa.»

Hausse du prix du kilogramme d’ivoire et impunité.

Ce dernier point est un véritable casse-tête pour les protecteurs de la faune. En 2005 par exemple, on était à 30 dollars (18.325 Fcfa) pour le prix de l’ivoire ; 260 dollars (158.817 Fcfa) en 2012 et 360 dollars (219 600 Fcfa) en 2014. Le mal c’est que ces espèces qui participent à l’équilibre de notre écosystème se reproduisent après une certaine période. «Les gorilles mettent bas -pas plus de deux petits- après chaque deux ans. Les éléphantes ne mettent bas qu’à un éléphanteau, et ce après quatre ans», avoue Anne Ntongho du Wwf. La réunion du Wwf avait pour objectif de sensibiliser les journalistes sur le trafic de l'ivoire, la criminalité faunique et la mise en application de la loi ; améliorer leurs compréhensions sur la crise de la viande de brousse et son implication sur le patrimoine faunique du Cameroun; renforcer le réseau de journalistes pour rendre compte des questions relatives au braconnage et à la viande de brousse.

© Camer.be : Franck BAFELI et Valgadine TONGA

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