Image du chef de l’Etat - Fixation : La danse avec des sorciers blancs
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Depuis son accession au pouvoir, il recrute des communicants français qui pompent les fonds publics, soi-disant pour polir son image.

Paul Biya, on le sait, a un faible pour l’expertise étrangère. Surtout lorsqu’il s’agit de polir son image ou celle du Cameroun à l’étranger. Dès son accession au pouvoir en 1982, le président de la République sollicite les services de communicants français. L’objectif pour le tout jeune dirigeant camerounais est de se donner une bonne image à l’international surtout en France où il est question de préserver ses réseaux. Les deux premiers communicants qui prennent le jeune Biya en main sont Claude Marti et Jean-Pierre Fleury.

Les deux hommes sont proches de la famille Mitterrand. Le premier a été le conseillé du président François Mitterrand  alors que le second, patron de l’agence Adefi a pour Associé Jean-Christophe Mitterrand. A partir de 1984, dans un contexte tendu entre Biya et son prédécesseur Ahidjo, soupçonné d’être derrière une tentative de coup d’Etat dont le but serait de le ramener au pouvoir, les communicants français du président de la République mouillent un peu plus le maillot. On quitte progressivement le terrain de la Com pour glisser sur celui des trafics de toutes sortes. C’est du moins ce qu’écrit Thomas Deltombe dans un article consacré à ce sujet paru dans Le Monde diplomatique en 2010.

« Les agences de com’ tendent à se transformer en officines de renseignement, écrit-il. C’est du moins ce qui se produit avec celle de M. Fleury : Adefi espionne les opposants camerounais installés dans l’Hexagone et filme leurs rassemblements parisiens. Plus troublante encore est l’utilisation par le pouvoir camerounais, à la même période, de Jacques Tillier, alors reporter au Journal du dimanche. Chargé de faire la promotion de M. BIYA dans les colonnes de son journal, Tillier était également missionné par le chef de la Sûreté nationale camerounaise : il monte, en France, une discrète officine pour surveiller Ahidjo, alors installé sur la Côte d’Azur. Il faut dire que Tillier est un "spécialiste".

Ancien agent de la direction de la surveillance du territoire (DST), l’homme, entré à l’hebdomadaire d’extrême droite Minute, s’était rendu célèbre en 1979, alors qu’il cherchait à interviewer Jacques Mesrine. Echaudé par les méthodes du journaliste, le gangster le blessa de trois balles de revolver. » A partir de1990, Paul Biya est contraint comme beaucoup d’autres dirigeants africains à ouvrir le jeu politique. Le discours de La Baule est passé par là. Le Cameroun retourne au multipartisme et les premières élections ont lieu en 1992. Pour cette grande première, Paul Biya ne veut pas manquer le coche. Pour sa campagne, il ne sollicite pas moins que les services du célèbre communicant français Jacques Séguéla, connu pour avoir fait les deux campagnes présidentielles de François Mitterrand.

468 832 euros, soit environ 305 millions FCfa !

Pour la version tropicalisée de son expertise dans les campagnes électorales, M. Séguéla sort de son chapeau, pour son client Biya, un slogan qui fait mouche : « L’homme lion ». « L’image, rugissante, commente Thomas Deltombe, paraît à première vue osée pour qualifier un homme taciturne, dont le style se situerait plutôt du côté de l’anachorète tropical ou du bureaucrate brejnévien. Les mauvais esprits estiment pourtant que l’analogie avec le roi des animaux, volontiers ronronnant, n’est pas sans pertinence. »

Le mariage en seconde noce du président Paul Biya avec la jeune Chantal Vigouroux en 1994 ouvre de nouveaux axes de communication pour le président. Femme issue d’un milieu modeste et réputée proche du peuple, elle se lance très vite dans des oeuvres caritatives. Elle crée la fondation Chantal Biya. Pour l’accompagner dans ses oeuvres humanitaires, on fait appel une fois de plus à l’expertise française : Patricia Balme, 58 ans, patronne de PB Communication décroche le juteux marché. Au-delà des activités de la Première dame et des actions de lobbying qu’elle organise pour le compte de Chantal Biya, Balme a à son actif la construction à prix d’or du site Internet de la Présidence camerounaise, l’achat d’espace dans la presse parisienne pour polir l’image du Cameroun et de son chef, dont une controversée double page promotionnelle dans les colonnes du Monde en mai 2012. Coup de l’opération : 468 832 euros, soit environ 305 millions FCfa !

D’autres communicants français ont et continuent d’émarger dans le budget de l’Etat camerounais. On peut citer Stéphane Fouks, Yasmine Domon Bahri, la patronne de Stratline communication. En 2011, cette dame convoya une quinzaine de journalistes français en goguette au Cameroun, tous frais payés. Elle dit « aider » le Cameroun dans le domaine de l’économie.

© Le Jour : Jean-Bruno Tagne

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