Le quotidien des troupes au front contre Boko Haram
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«  Chaque jour, je prends le service à 6 h, voire 5 h du matin. Et c’est non-stop. Parfois, il n’y a pas d’heure de repos. On bosse en fonction de la menace et des informations disponibles. »

Ces propos sont de Ngah Tsala, 26 ans, soldat de 2e classe de l’armée de l’air BA201 (Base aérienne 201). Ce soldat, venu de Douala, est en détachement au site de Mabass, qui fait partie de la trentaine de postes disposés le long de 400 kilomètres de frontière entre le Cameroun et le Nigéria. A Mabass, dans le département du Mayo-Tsanaga, on n’a pas que des fusiliers : le Régiment de l’artillerie sol sol (Rass) a mobilisé ses tireurs d’élite. D’autres forces militaires sont présentes. Parce que la menace est asymétrique dans cette zone montagneuse où Boko Haram contrôle Madagali, ville nigériane voisine, située dans la vallée. Le 20 décembre, des assaillants ont incendié l’Eglise baptiste et brûlé des gens de Mabass. Et ils ont promis de revenir. Depuis lors, le dispositif a changé. « Nous sommes sur le qui-vive 24 heures sur 24. On veille de jour comme de nuit », précise le chef de poste de Mabass, l’adjudant Essamé. Deux lignes de front sont opérationnelles. Et il est difficile de franchir la première ligne située au front, ni la deuxième ligne, en retrait, là où les actions de riposte et les offensives se préparent. Et nos militaires sont disséminés dans cette montagne.

A Kolofata, Kérawa et Amchidé, des localités du Mayo-Sava, frontalières au Nigéria, les attaques et embuscades sont régulières. Mais, les troupes de l’opération Alpha, imperturbables soldats du BIR, sont en place. Et elles tiennent leurs positions depuis huit mois. « C’est une vie de privations. Nos hommes sont toujours en éveil. C’est l’alerte maximale. On est en opération à tout moment : chaque jour, on procède aux patrouilles pédestres et motorisées. On fait la recherche du renseignement. On mène aussi des opérations ciblées sur des objectifs définis », détaille le capitaine Ibrahim Njankouo, commandant en second de la zone de l’opération Alpha, à Kolofata. Parce que l’ennemi ne dort jamais, des dispositifs spécifiques sont déployés. « On a mis en place des services de garde statique au camp et le service de garde mobile (par exemple lors des escortes de convois). Nous faisons tout cela en recherchant les combattants de Boko Haram », renchérit notre source. Rien n’est négligé.

A l’entrée de chaque camp, des hommes veillent sur les tranchées et l’arsenal militaire. Des forces d’appui sont en renfort pour manipuler l’artillerie lourde et des appareils de détection de mouvement d’ennemis à bonne distance. Cette synergie d’actions a permis à nos forces de mettre en déroute les assaillants le 12 janvier 2015, lorsqu’ils ont attaqué le poste de commandement de Kolofata, pour tenter de s’emparer des armes et hisser le drapeau de Boko Haram. « Ils ont essuyé une défaite. Selon nos pointages, ils ont perdu quatre généraux et des dizaines de combattants », rapporte notre source.

Combattre la guérilla terroriste

A Fotokol, chef-lieu de l’arrondissement éponyme, dans le Logone et Chari, les combats sont presque quotidiens. Boko Haram veut, à tout prix, contrôler le pont sur le fleuve El Beid, pont de liaison entre le Cameroun et le Nigéria. Cette secte islamiste a carrément imposé une sorte de guérilla. Et les soldats camerounais, bien conscients des enjeux économique et stratégique de ce pont, ne dorment plus. Les dispositifs offensifs et défensifs sont réajustés, après l’attaque du 4 février 2015 au cours de laquelle une centaine de civils, et une vingtaine de soldats camerounais (6) et tchadiens (13) ont été lâchement tués ou froidement égorgés. Deux lignes de front sont redéfinies. Côté tchadien, un détachement en renfort, est déployé sur le pont. « On ne ferme plus l’œil. Ces assaillants qui bénéficieraient des complicités au sein des populations acquises à leur cause ont profité du temps d’adaptation tactique avec l’arrivée de nos alliés tchadiens. Maintenant la donne a changé. Désormais nos actions sont coordonnées. Et nous tenons nos positions », explique le chef de bataillon, Désiré Maidoang, chef de poste de commandement basé à Kousseri. Et chaque jour, la gestion des imprévus n’est pas négligée.

Sur le terrain, il n’y a pas de répit pour les 6 000 soldats camerounais engagés pour traquer les combattants de Boko Haram qui ont changé de stratégie. Ils veulent imposer une guérilla dans les villes frontalières. Mais l’organisation de nos forces est bien huilée : les deux opérations Emergence 4 et Alpha, sous la coordination du commandant de la 4e Région militaire interarmées (RMIA4), le Colonel Jacob Kodji, disposent des hommes disciplinés et professionnels pour répondre à cette menace. L’arsenal de guerre disponible est moderne. « La machine contre Boko Haram est lancée. Nos positions aux frontières sont bien tenues, au point qu’aucun centimètre de notre territoire n’est occupé par ces combattants. Les prochains jours, nous allons monter en puissance, avec les moyens, renforts et équipements annoncés », analyse le colonel Jacob Kodji.

A travers les différents postes de détachement visités pendant cinq jours, les trois départements (Mayo-Sava, Mayo-Tsanaga, Logone et Chari) en situation de guerre sont bien quadrillés. Les soldats de rang, les sous-officiers, officiers et officiers supérieurs, rencontrés au front, sont « déterminés à transformer les petites victoires actuelles, en une éradication de cette nébuleuse », comme le souligne le Colonel Joseph Nouma, commandant des Opérations Alpha

© Cameroon Tribune : Olivier LAMISSA KAIKAI

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