Lutte contre Boko Haram - Un général tchadien ou camerounais : qui commandera la coalition ?
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Lutte contre Boko Haram - Un général tchadien ou camerounais : qui commandera la coalition ? :: CAMEROON

Les soldats tchadiens se sont précipités à entrer triomphalement au cameroun, alors que les questions liées au commandement des troupes et au contenu de la mission, entre autre, restent sans réponses.

L’euphorie qui a suivi l’arrivée des 2500 soldats tchadiens en territoire camerounais samedi dernier est retombée. Une semaine après l’accueil triomphal que les populations de Kousséri leur ont réservé, les observateurs s’interrogent déjà sur les modalités de mise en place de la coalition internationale dont fait partie le Tchad. En effet, les Saos ainsi que sont surnommés lesmilitaires de ce pays voisin, sont stationnés à Maltam, une localité du département du Logone et Chari. Depuis qu’ils sont entrés en territoire camerounais pour combattre la secte Boko Haram avec un impressionnant arsenal, les Tchadiens n’ont pas tiré le moindre coup de feu.

En revanche, la secte a poursuivi ses exactions en terre camerounaise comme si elle était plutôt encouragée par cette venue. Les militaires camerounais eux aussi poursuivent leur travail de coercition sans plus s’occuper de leurs hôtes. Mais, dans l’opinion on s’interroge. Que sont-ils venus faire, ces soldats tchadiens ? Vont-ils se contenter de combattre la secte à partir du sol camerounais ? Pourquoi ces militaires tchadiens ne font-ils pas déjà route vers Baga ainsi que leur président l’avait annoncé ? Selon leministre de la Communication du Cameroun, qui s’exprimait sur la question le 19 janvier dernier, les choses ne sont pas si simples :

« Il faudrait que les états-majorsmilitaires (des deux pays) se retrouvent, bâtissent une plate-forme (et) procèdent à une distribution spatio-temporelle des troupes aussi bien camerounaises que tchadiennes », a expliqué Issa Tchiroma. Des explications qui pour un militaire camerounais, « nous laissent dans le déclaratoire. Il faut que soit précisée quelle est leur mission », poursuit-il.

Selon nos sources, personne ne sait encore ce qui va se passer exactement. Un autre militaire soutient que rien ne peut être arrêté pour l’instant. « Le président Paul Biya lors du dernier sommet de la Francophonie à Dakar avait promis aux autres chefs d’Etat des pays concernés par les exactions de Boko Haram de les réunir en sommet à Yaoundé, pour fixer les modalités selon lesquelles serait constituée une coalition. »Anotre connaissance rien de tel n’est prévu ces prochains jours. En attendant, le président Idriss Deby du Tchad qui semble avoir pris la question à son compte engrange des victoires dans son ambition de chapeauter cette coalition.Ainsi, après le ballet diplomatique etmilitaire qu’il a engagé le 14 janvier dernier en se disant disposé à soutenir le Cameroun dans sa lutte contre la secte, le Tchad a conquis la position de leader de la lutte contre BokoHaramque s’était arrogée le Nigéria, pense notre confrère JeuneAfrique : « L'Union africaine (UA) a entériné le transfert de l'état-major de la force régionale de lutte contre Boko Haram du Nigeria à  N'Djamena, décidé la veille lors d'une réunion de crise (de la Cblt le 20 janvier) à Niamey », écrit notre confrère.

Un siège qui était matérialisé par la base de Baga. Idriss Deby avait déclaré que la reconquête de Baga était le premier objectif de ses militaires. Une base multinationale où le  Cameroun avait déclaré en mars 2014 qu’il n’enverrait jamais ses troupes, et, d’où le Niger et le Tchad avaient retiré leurs troupes avant que Boko Haram ne s’en empare dans un retentissant bain de sang, au début du mois. Ce transfèrement de siège signifie-t-il que la force de la Cblt va enfin être opérationnelle ainsi que l’a souhaité, à Niamey, le ministre camerounais Pierre Moukoko Mbonjo, qui l’a annoncé au sortir d’une réception qu’avait organisée le président Issoufou du Niger ? « Tous ces pays ont convenu de l’urgence de l’opérationnalisation de la force multinationale de la Cblt en même temps, d’élever le niveau d’intervention enAfrique», a déclaré le ministre des Relations Extérieures.

C’est donc cette force de la Cblt qui avait été mise sur pied à Yaoundé, qui va entrer en guerre. Elle a été créée en 1998 et n’a jamais fonctionné. Elle a été réactivée lors de la deuxième réunion des ministres de la Défense nationale et des chefs d’Etat-major sur la sécurité dans le bassin du Lac Tchad des pays membres de la Commission du bassin du Lac Tchad (Cblt), qui s’est déroulée le 18mars 2014 à Yaoundé, et qui a permis de mettre sur pied une force multinationale. Elle devrait faire face à l’insécurité grandissante dans cette zone, que partagent le Cameroun, le Niger, le Nigéria, la République centrafricaine et le Tchad. Les délégations de ces pays avaient décidé que la force aurait unmandat d’un an et serait dirigée pendant une période transitoire de sixmois par le Nigéria.

Côté Cameroun, c’est le colonel Ndougou Hypolite Jean, qui avait été nommé conseiller militaire auprès du secrétaire exécutif de la Cblt, qui devait coordonner la cellule de suivi de la Force. Le ministre délégué à la présidence chargé de la Défense duCameroun, EdgardAlain Mebe Ngo’o, avait annoncé officiellement que le Cameroun fournira un bataillon de 700 militaires. Plus tard, le secrétaire exécutif de la Commission du Bassin du lac Tchad (Lcbc), Sanusi Abdullahi, avait déclaré que la task force  conjointe mise sur pied par la commission contribuerait à lutter contre le terrorisme dans les Etats membres.

La force de la Cblt, devrait selon les calculs des autorités, être constituée de 2800 hommes. Aujourd’hui des militaires camerounais nuancent que chaque pays devrait fournir 700 hommes au moins. Or, avec ses 2500 hommes, le contingent tchadien dirigé par le Général Ahmat Darry Bazine, secondé du Général Adam Abdoulaye et ayant comme commandant des opérations le Colonel Haroun Ahmat Djéroua ; sera sans doute le plus important. « Le commandement logiquement devrait lui être confié », explique un militaire. Seulement, des sources de premièremain disent que puisque la force sera basée au Cameroun, elle sera commandée par un général camerounais que va seconder un général Tchadien. Son poste de commandement devrait être à Maroua.

Autre chose, où qu’elle siège, il faut trouver un habillage juridique à cette force. « C’est important parce qu’il faut prévoir d’avance dans quel cadre seront jugées les éventuelles exactions des membres de celle-ci », explique un militaire. Or, le président Idriss Deby sur la question n’est pas bien clair. Un coup c’est la Ceac, un autre c’est l’Union africaine, un autre encore c’est l’Onu, avant de clamer qu’il faut que la défense des Africains soit gérée par les Africains sans l’intervention des tiers. Finalement sous quelle égide sera mise cette force ?

Au cas où la tutelle de la force serait désignée, il faudrait que soit rédigé un Memorandum of Understanding (Mou) qui est un document décrivant un accord ou une convention bilatérale ou multilatérale entre ses parties. Elle déclare une convergence d'intention entre les différentes parties, indiquant une ligne d'action commune. Il est souvent utilisé dans les cas où les parties n'ont pas impliqué un engagement juridique ou bien dans des situations où les parties ne peuvent pas créer une entente ayant force exécutoire. Il est une alternative plus formelle comparée à un gentleman’s agreement. Certains se demandent aussi quel est le délai de l’opération que vamener cette force ? «C’est une question d’autant importante que, l’armée du Rwanda est intervenue dans de pareilles conditions en République démocratique du Congo. Elle est entrée facilement mais, pour sortir ça n’a pas été évident. On soupçonne qu’elle leur a laissé des avatars comme la rébellion du M23 », rappelle notre source avant d’interroger. : Comment ces Tchadiens vont ressortir du Cameroun ?

© Le Jour : Aziz Salatou

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