Marche contre le terrorisme : Pourquoi Paul Biya n’était pas Paris
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Le chef de l’Etat n’a pas été invité à participer à la manifestation du 11 janvier dernier. Avec François Hollande, un malentendu couverait au sujet d’une coopération jugée insignifiante dans la lutte contre Boko Haram.

Des signes.

Ce dimanche 11 janvier 2014, six chefs d’Etats africains ont participé, à Paris, à la marche républicaine contre le terrorisme. Paul Biya n’y était pas. La faute, explique-t-on de prime abord, à la soudaineté de cette manifestation. Car d’après les services de l’ambassade de France, les choses sont allées très vite. L’ambassade du Cameroun à Paris n’a été informée que samedi soir et seul l’ambassadeur Lejeune Mbella Mbella a donc pu être présent. « De nombreux pays ont été représentés par leurs ambassadeurs, le Cameroun en fait partie », ajoute cette source diplomatique qui tient à saluer les mots de compassion formulés par Paul Biya dans le discours prononcé lors de la cérémonie de présentation des vœux au corps diplomatique le 08 janvier.

Mais les précautions du diplomate peinent à dissiper les signes d’un malaise évident. D’après l’historien des relations internationales, Jean Koufan, la pomme de discorde réside principalement dans l’insuffisante coopération militaire entre les deux pays face à l’ennemi Boko Haram. «Confronté à la secte islamiste, le Cameroun a le sentiment de se battre tout seul. Il y a à la base un mouvement d’humeur du Cameroun qui se rend compte que depuis qu’il a déclaré la guerre à Boko Haram, il n’a pas eu le soutien qu’il attendait de cet allié ».

D’après l’universitaire, le sentiment d’ostracisme de Paul Biya prend davantage de sens lorsqu’on remarque que les présidents malien, sénégalais, nigérien et béninois, qui sont des alliés de la France dans la lutte contre le terrorisme dans le sahel ont bien été conviés à Paris. « Depuis un certain temps, quand on voit la redondance des récriminations camerounaises à l’égard de la France, on peut soupçonner qu’il y a un malaise au sommet de l’Etat. C’est à une extériorisation de ce mécontentement qu’on assiste là », croit savoir Jean Koufan. Car officiellement, le Cameroun n’a pas réagi aux tueries du 07 janvier. Ni message de condoléance, ni communiqué de soutien. « Nous avons reçu des appels téléphoniques de plusieurs membres du gouvernement. Nous pensons que le ministre des relations extérieures pourrait exprimer très prochainement des messages de condoléances », veut se rassurer la source de l’ambassade de France à Yaoundé.

Malaises  

Pour rappel, le président français François Hollande s’était montré très concerné par l’insécurité dans le sahel africain. A son initiative, il avait convié, en mai 2014, les présidents nigérian, nigérien, tchadien, camerounais et béninois à un sommet à Paris au cours duquel Paul Biya avait alors officiellement déclaré la guerre à Boko Haram. Pourtant, les renforts espérés par Yaoundé n’ont jamais suivi. «Traditionnellement, le Cameroun a une coopération militaire avec la France. Il peut estimer qu’il n’a pas eu l’appui qu’il pouvait espérer sans nécessairement l’expliquer de manière officielle. Le problème, c’est qu’il y a des malentendus implicites sur les questions touchant au terrorisme dans la région du lac Tchad », renchérit pour sa part le politologue Mathias Eric Owona Nguini. Aimé Raoul Sumo, chercheur sur les questions de sécurité a un avis plus tranché. « Sur le front de Boko Haram, la coopération avec la France est fictive. On ne peut donc pas dire qu’elle est insuffisante car elle n’existe même pas». Depuis le début de la guerre, explique t-il, la France ne s’est aucunement manifestée. Seuls les Etats-Unis communiquent régulièrement aux autorités camerounaises des renseignements collectés à partir de leurs drones.

En octobre 2014, lors de la visite de son homologue Claude Bartolone au Cameroun, le président de l’Assemblée nationale, Cavaye Yeguié Djibril, s’était lui-même ému de cette situation. « On ne voit toujours rien », avait-il résumé dans une déclaration que la presse a alors assimilée à un appel à l’aide. La non invitation du président camerounais dans ce qui s’apparente à une croisade mondiale contre le terrorisme est, de ce point de vue, surprenante. « Si Paul Biya n’est pas allé à Paris, c’est qu’il n’y a pas été invité », insiste Raoul Sumo pour qui, « le Cameroun a la capacité opérationnelle de venir à bout de Boko Haram. Le seul problème, c’est celui de l’incapacité du Nigéria à garantir le monopole de la violence légitime sur son territoire », achève t-il

© La Nouvelle Expression : Serge-Lionel Nnanga

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